Title: Sociologie du politique El
1Sociologie du politique Eléments pour une
introduction
- Helene Thomas professeure des universités en
science politique
2Introduction
- Un cours dintroduction
- à la sociologie et à ses raisonnements à
travers la présentation des grands auteurs et des
grandes traditions - et aux sciences du politique à travers quelques
uns de leurs objets - La démocratie représentative
- La forme Etat-Nation genèse et évolutions
- Les classements sociaux en démocratie
- La participation politique et la socialisation
- Les groupements politiques
3La sociologie un discours sur le politique parmi
dautres
- Quels discours sur le politique?
- Discours savants et discours pratiques?
- Les discours scientifiques sur le politique
- Une sociologie du politique?
- oui mais laquelle?
4Sociologie DU POLITIQUE
- Masculin Féminin
- singulier pluriel
- unité diversité
- centralité périphérie
5Quels problèmes en sciences humaines?
- Mais le plus gros problème est lié au fait que
le savant fait partie de son sujet détude et
doit construire un point de vue abstrait et
artificiel pour regarder et observer comme sil
nétait pas pris dans la société politique de son
temps - Ce qui implique que, même sil pratique
linduction (i.e. part du terrain pour analyser
ensuite ses données), il doit avoir au moins une
hypothèse, un concept ou une définition qui lui
permette de sorienter sur le terrain de
délimiter ce quil cherche et de le voir
6Plan du cours introductif
- I. Prolégomènes sur le phallo/ethno/géocentrisme,
de lintitulé sociologie du politique - A. un regard possible sur le politique
- B. Le questionnement des sciences du
politique un questionnement objectiviste ? - II. La notion de politique
- A. Les domaines du politique. Une notion et un
domaine pluriels en expansion continue - B. Un objet de discours pratiques et engagés
-
- III. Comment en faire une science?
- A. Les méthodes scientifiques sont elles
applicable à la politique? - B. Comment faire une sociologie des idées/
idéologies de la politique et une théorie et à
quoi ça sert ?
7Plan détaillé du chapitre introductif
- I. Prolégomènes sur le phallo/ethno/géocentrisme,
de lintitulé sociologie DU politique - A. un regard possible sur le politique
- 1 un regard situé 2. Un regard limité
au contemporain et occidentalo centré - B. Le questionnement des sciences du politique
un questionnement objectiviste ? - 1. Machiavel, Montesquieu et la première
naissance de la science politique - 2. Discours normatifs et discours descriptifs
- II. La notion de politique A. Les domaines
du politique. 1. Une notion et un domaine
pluriels 2. en expansion continue - B. Un objet de discours pratiques et engagés
- 1. La politique comme un art et un savoir-faire
- 1. La politique comme science de la doxa
- III. Comment en faire une science?
- A. Les méthodes scientifiques sont elles
applicable à la politique? - 1. Quest-ce quun raisonnement scientifique ?
- 2. Peut-on transposer les méthodes des sciences
de la vie et à quel prix ? - B. Comment faire une sociologie des idées/
idéologies de la politique et une théorie et à
quoi ça sert ?
8Un regard possible
- La sociologie politique est un regard, un
regard seulement parmi dautres possibles, sur
lobjet politique Parmi les principaux discours
possibles sur lobjet politique on retiendra
dabord celui de lacteur engagé. Militants,
représentants, élus, dirigeants mais aussi des
intellectuels impliqués dans des combats pour une
grande cause, élaborent des analyses qui ont
toujours une ambition explicative mais surtout
celle de justifier leur action. Cette dimension
conduit à valoriser les faits et les éléments
dappréciations qui ont une utilité stratégique
P. Braud in Sociologie Politique, LGDJ, 1996. 7 - Autre discours sur lobjet politique celui du
philosophe voir du prophète. Accent placé sur la
question des valeurs. Troisième discours sur
lobjet politique majeur aujourdhui celui des
médias
9BRAUD
- La sociologie politique est un regard, un
regard seulement parmi dautres possibles, sur
lobjet politique Parmi les principaux discours
possibles sur lobjet politique on retiendra
dabord celui de lacteur engagé. Militants,
représentants, élus, dirigeants mais aussi des
intellectuels impliqués dans des combats pour une
grande cause, élaborent des analyses qui ont
toujours une ambition explicative mais surtout
celle de justifier leur action. Cette dimension
conduit à valoriser les faits et les éléments
dappréciations qui ont une utilité stratégique
P. Braud in Sociologie Politique, LGDJ, 1996. 7 - Autre discours sur lobjet politique celui du
philosophe voir du prophète. Accent placé sur la
question des valeurs. Troisième discours sur
lobjet politique majeur aujourdhui celui des
médias. 2 la sociologie politique est une branche
de la science politique qui conquiert très
lentement sa visibilité sociale à partir de la
fin du 19ème siècle P. Braud in Sociologie
Politique, LGDJ, 1996 . 7
10Chagnollaud
- La sociologie politique est une branche de la
science politique ayant pour objet danalyser ce
qui relève de phénomènes considérés comme
politiques. D Chagnollaud in Science politique
Dalloz 2002
11Lagroye
-
- La sociologie politique occupe une place
particulière parmi les disciplines que lon
associe habituellement quand on parle de science
politique. - -Objet denseignements spécifiques dans les
universités comme PP HDI IPA PP - -Méthode dapproche des objets politiques
- La sociologie politique est une science
sociale. Elle est démarche sociologique en ce
quelle tend à expliquer tous les phénomènes
sociaux ayant une influence sur les activités et
les rôles politiques, sur les affrontements entre
partis sur les comportements des électeurs sur
les rites institutionnels sur les discours
politiques etc. Elle est politique en ce que sont
objet propre et lensemble des phénomènes tenus
pour politiques par une communauté dindividus.
La sociologie politique est aussi lattention
portée aux effets politiques (tels que voter
refuser toute participation rejoindre les rangs
dun parti, manifester) de faits sociaux
apparemment étranger aux actions politiques . J.
Lagroye et alii 2006, Sociologie politique,
Presses de la FNSP et Dalloz.
12Colas
- Ainsi la sociologie politique serait la science
de la société civile et en tant que la politique
soccupe de lintérêt commun, elle constituerait
une science architectonique, à laquelle serait
subordonnées léconomie et la stratégie et toute
les autre sciences sociales. Le choix de
sociologie plutôt que de science politique peut
signifier une rupture avec cet héritage
laffirmation de la scientificité positive de la
discipline. - En philosophie, l'architectonique est la
coordination scientifique de tous les savoirs ou
des diverses parties d'un système. Le terme a
d'abord été utilisé par Aristote dans L'Ethique à
Nicomaque la politique est l'art de
l'architectonique, qui organise les activités de
la Cité. - En architecture, l'architectonique signifie l'art
et la science de la construction.
13Gilles de Rome
- Définition du XIII eme siècle Gilles de Rome
(en1260 en latin 1296 en français) livre du
gouvernement des princes la Science politique
que lon appelle science de gouverner les cités
et les royaumes tend principalement à réguler les
œuvres humaines par les lois et les institutions
quelle commande
14Colas
- Changement dans le contenu des problèmes
apparition de novations sociales, transformation
diverses et nouveau type de discours de la
science. - Hypothèse contraire la sociologie politique
doit centralement étudier les formes politiques
et les institutions politiques nées avec le
XIXeme siècle les partis politiques, les
élections au suffrage universel, les prises de
décision par les gouvernements, le fonctionnement
des administrations, la sélection des élites
dirigeantes, les relations entre les entités
politique souveraines et tous les aspects des
Etats modernes seraient son objet bref lEtat
européen moderne de la fin du XIXème siècle
danger dethnocentrisme - Dominique Colas, Sociologie politique, PUF,
Quadrige, 1994
15Colas
- Cest donc bien la saisie dun objet qui même
sil noccupe quune région de la vie sociale ne
se laisse pas cantonner dans une ère culturelle
et un siècle donné quil faut procéder et qui
exige une comparaison avec des formes voisines et
ou distincte - Dominique Colas, Sociologie politique, PUF,
Quadrige, 1994
16 Le politique
- La politique, cest dabord la traduction du
terme grec politeia. La politique, cest par
essence ce que les Grecs appelaient le régime de
la cité, cest-à-dire - le mode dorganisation du commandement
- centralisé, déconcentré, décentralisé, décentré
- considéré comme caractéristique du mode
dorganisation de la collectivité toute entière.
17Le et la politique du sens englobant au sens
limité
- Si la politique est essentiellement
- le régime de la collectivité toute entière
- ou son mode dorganisation,
- nous comprenons léquivoque du sens limité et
du sens englobant. - En effet, le sens limité sapplique au système
particulier qui sélectionne les gouvernants et
définit le mode dexercice de lautorité, - mais simultanément, le mot peut sappliquer
- sens englobant au mode de coopération des
individus à lintérieur de chaque collectivité .
- Raymond Aron, Démocratie et totalitarisme, Paris,
Gallimard, 1965, cité in coll. Idées , 1975,
p. 25.
18. La politique et les politiques publiques
- 1. La politique-programme (policy ou politiques
publiques) lexécution des décisions - 2. versus la politique-domaine (politics) lieu
du conflit et de la délibération - 3. Des sens connexes une influence réciproque
- une influence de la politique (politics) sur les
politiques publiques (policies) et inversement.
19La politique programme ou policies
- La politique-programme (policy ou politiques
publiques) - On appelle policy une conception, un programme
daction ou une action elle-même dun individu,
dun groupe ou dun gouvernement. - Lorsquon se réfère à la politique de lalcool on
vise lensemble du programme daction appliqué à
un problème donné, celui des excédents ou des
déficits de la production - Quand on évoque la politique de Richelieu, on
songe à la conception que Richelieu se faisait
des intérêts du pays, aux objectifs quil voulait
atteindre et aux méthodes quil employait.
20La politique programme policies matter
- En un premier sens la politique désigne donc le
programme, la méthode daction ou laction
elle-même dun individu ou dun groupe concernant
un problème ou la totalité des problèmes dune
collectivité Raymond Aron, Démocratie et
totalitarisme, Paris, Gallimard, 1965, cité in
coll. Idées, 1975, p. 21-22.
21Versus la politique-domaine
- la politique-domaine (politics)
- espace du conflit (politics ou la politique)
et de la compétition entre les programmes et les
candidats à lexercice du pouvoir - mais aussi de la coopération et du compromis
entre ces acteurs.
22la politique domaine politics matters
- - En un autre sens, la politique, politics en
anglais, sapplique au domaine dans lequel
rivalisent ou sopposent les politiques diverses
(au sens de policies). - La politique-domaine est lensemble où sont aux
prises individus ou groupes qui ont chacun leur
policy, cest-à-dire leurs objectifs, leurs
intérêts leur philosophie parfois.
23Deux sens connexes
- Ces deux sens du mot politique bien quils soient
distincts, sont connexes. - () la sociologie de la politique traite de
certaines institutions, telles, dans les sociétés
modernes, les partis, le Parlement,
ladministration , ibid p.22 et 24. - Des sens connexes une influence réciproque
- une influence de la politique (politics) sur les
politiques publiques (policies) et inversement. - Lexemple des politiques de lutte contre
linsécurité en France.
24Politics ? Policies
- Le débat autour des actions à mener sest
développé depuis de lélection présidentielle de
2002 çà cest de la politique (politics)
influant sur les programmes daction menés par le
gouvernement en la matière (policy ou politique
publique de lutte contre linsécurité) . - En retour
- Policy ? Policies ces politiques publiques menées
influent à la fois sur les autres politiques
publiques sectorielles menées par le gouvernement
(policies) par exemple sur les politiques
pénales, judiciaires, éducatives, sociales, de la
ville etc.,
25Policy? Politics
- Influe aussi
- sur le débat politique national entre la majorité
parlementaire et lopposition à lassemblée et
dans les médias bref sur la politique au sens de
politics, - Et également sur les aspects non politiques de la
vie des citoyens (leur vie familiale, leurs
rapports de voisinage, etc.).
26Trois sens du mot politique
- les modes dorganisation des gouvernements et
des sociétés humaines - les types daction qui concourent à la
direction des affaires publiques - les stratégies résultant de la compétition des
individus et des groupes - G. Balandier , Anthropologie politique, PUF,
1967, p.32
27Plus un
- Mais aussi La connaissance politique
- Les moyens dinterprétation et de justification
auxquelles recourt la vie politique - La connaissance politique ou plutôt les
discours sur la politique font également partie
du domaine de la politique
28Leca
- La politique est lensemble des normes,
mécanismes et institutions attribuant lautorité,
désignant les leaders, réglant les conflits qui
menacent la cohésion de lensemble intérieur et
organisant les relations avec lextérieur (tout
ceci avec plus ou moins de succès), ou encore
linstance où sarticulent depuis le début des
rapports de commandement - obéissance (le
droit)et de puissance - soumission (la force)
Jean LECA, Traité de science politique,
Introduction, PUF, 1986.
29Un objet de discours
30Un objet de discours pratiques
- 1. La politique des acteurs un art
politique - 2. La politique des médias un discours
demi-savant dont les problématiques sont
implicites -
- 3. La politique des savants entre perspective
normative et perspective objectiviste
31Qui tient des discours sur la politique?
- Les hommes et les femmes politiques?
- Les fonctionnaires?
- Les initiés, les infiltrés?
- Les experts?
- Les intellectuels, les artistes?
- John Doe? Monsieur tout le monde?
32Qui sont les praticiens?
- Professionnels et amateurs
- Sacré et profane
- Acteurs et spectateurs
33Où sont les acteurs?
- Dans le champs du pouvoir politique
- central,
- périphérique
- et périphérique-périphérique
- Dans le champ politique
- central,
- périphérique et périphérique-périphérique
34 Le discours des acteurs
- La politique comme un des beaux-arts
- La politique comme artisanat
- La politique comme métier
- Ses ficelles
- Ses fins
- Ses règles de lart
352. La politique comme spectacle du monde
- Un spectacle tragi-comique suscitant des émotions
- La catharsis télévisuelle
- La politique comme théâtre
- de marionnettes
- comme scène tragique
36La politique comme spectacle
- Le savoir médiatique ou le savoir des
émotions et de l homme de la rue - Sensationnel
- Fait-diversification du politique
- Encodage de linformation
- Connivence des acteurs professionnels et des
metteurs en images
37La politique des savants
- entre perspective normative
- et perspective objectiviste
- Savants et intellectuels le rôle des clercs
dans la Cité un vieux débat - Démagogues, pédagogues et mystagogues
38La définition philosophique implique une
perspective normative
- Quels sont les fins du politique ?
- exemples de lapproche de Platon et Aristote
- La recherche
- du juste bien
- du bien-vivre ensemble
- du bonheur de la communauté dans léquité
39Introduire au politique
- Une introduction à la sociologie et à ses
raisonnements à travers la présentation des
grands auteurs et des grandes traditions - et aux sciences du politique (sociologie
histoire et philosophie) à travers quelques uns
de leurs objets - La démocratie représentative
- La forme Etat-Nation genèse et évolutions
- Les clivages et classements en démocratie
- La participation politique et la socialisation
- Les groupements politiques
40Quest-ce quun raisonnement scientifique dans
les sciences du politique
- III. A quelles conditions les sciences de
lhomme et de la société sont-elles devenues des
sciences? - A. Quelles sont les caractéristiques dun
raisonnement scientifique en général - B. Quels sont les modes de raisonnement et les
problèmes spécifiques des sciences humaines
sociales?
41Quest-ce quun raisonnement scientifique en
général?
- 1.Un raisonnement hypothético-déductif cartésien
- Mathématiques, logique formelle une hypothèse
appliquée à un exemple - Sciences expérimentales Hypothèse théorique
appliquée à une empirie - 2. Une démonstration reposant sur un dispositif
empirique contrôlé le protocole expérimental - 3. Un résultat validé et vérifié par répétition
de ladministration de la preuve - Qui est donc universellement vrai dans les
conditions (paramètres) de lexpérience - Et devient donc une loi explicative de lempirie
- Discours de la méthode pour bien conduire sa
raison et chercher la vérité dans les sciences ,
Leyde, 1637
42Quels problèmes spécifiques se posent au savant
en sciences humaines?
- 1.Pas dhypothético-déductif mais souvent de
linductif de lempirie à la théorie - La démarche va de lobservation à lanalyse des
observations et éventuellement à leur explication
- 2. Pas dexpérimentation sur les sujets humains
ou rarement mais un analogon des conditions de
laboratoire - 3. Pas de vérité (critère du vrai)
- mais veri-similitude ou veri-probabilité sous
conditions - Pas de validité universelle des résultats mais au
mieux une validité générale des concepts et une
validité locale des résultats
43 Quels problèmes en sciences humaines?
- Mais le plus gros problème est lié au fait que
le savant fait partie de son sujet détude et
doit construire un point de vue abstrait et
artificiel pour regarder et observer - Ce qui implique que, même sil pratique
linduction (i.e. part du terrain pour analyser
ensuite ses données), il doit avoir au moins une
hypothèse, un concept ou une définition qui lui
permette de sorienter sur le terrain de
délimiter ce quil cherche et de le voir
44Maîtriser
- L'intellectualisation et la rationalisation
croissantes ne signifient donc nullement une
connaissance générale croissante des conditions
dans lesquelles nous vivons. Elles signifient
bien plutôt que nous savons ou que nous croyons
qu'à chaque instant nous pourrions, pourvu
seulement que nous le voulions, nous prouver
qu'il n'existe en principe aucune puissance
mystérieuse et imprévisible qui interfère dans le
cours de la vie bref que nous pouvons maîtriser
toute chose par la prévision.
45Techniciser et intellectualiser
- Mais cela revient à désenchanter le monde. Il ne
s'agit plus pour nous, comme pour le sauvage qui
croit à l'existence de ces puissances, de faire
appel à des moyens magiques en vue de maîtriser
les esprits ou de les implorer mais de recourir à
la technique et à la prévision. Telle est la
signification essentielle de l'intellectualisation
.
46Expertiser pour prévoir
- Premièrement la science met naturellement à notre
disposition un certain nombre de connaissances
qui nous permettent de dominer techniquement la
vie par la prévision, aussi bien dans le domaine
des choses extérieures que dans celui de
l'activité des hommes. Vous me répliquerez
après tout, cela n'est rien d'autre que la
marchande de légumes du jeune Américain. Tout à
fait d'accord.
47Lexpert ou la marchande de légumes du jeune
américain
- Le jeune Américain ne respecte rien ni personne,
ni tradition ni situation professionnelle, mais
il s'incline devant la prouesse personnelle d'un
quelconque individu. Cela, il l'appelle
démocratie . Aussi caricaturale que puisse
paraître la réalité américaine lorsqu'on la
compare à la signification vraie du mot
démocratie, c'est ce sens qu'il lui donne et cela
seul est important pour le moment. - Il se fait de son professeur une idée simple
celui-ci lui vend des connaissances et des
méthodes pour l'argent de son père, exactement
comme la marchande de légumes vend des choux à sa
mère. Rien d'autre. Si le professeur est par
exemple un champion de football, on n'hésitera
pas, il est vrai, à le considérer comme un chef
dans ce domaine précis. - Mais s'il ne l'est pas (ou s'il n'est pas quelque
chose de similaire dans un autre sport), il n'est
qu'un professeur et rien de plus. - Il ne viendrait jamais à l'idée du jeune
Américain que son professeur pourrait lui vendre
des conceptions du monde ou des règles
valables pour la conduite de la vie. Bien sur,
nous rejetons une pareille conception, ainsi
formulée. Cependant on peut se demander si cette
façon de voir, qu'à dessein j'ai grossie quelque
peu, ne contient pas un grain de vérité.
48Des méthodes de pensée mais lesquelles MP EP SP
- En second lieu, la science nous apporte quelque
chose que la marchande de légumes ne peut à coup
sûr nous donner des méthodes de pensée,
c'est-à-dire des instruments et une discipline.
Vous me rétorquerez peut-être qu'il ne s'agit
plus cette fois-ci de légumes, mais de quel, que
chose qui n'est qu'un moyen pour se procurer des
légumes. Soit ! Admettons-le en attendant.
49Quels outils?
- Quels outils pour le savant
- Quels outils pour lexpert
- Quels outils pour les acteurs de terrain
- Pour quoi en faire?
50Concepts et hypothèses
- Concept
- action de contenir idée abstraite générale,
résultat de lopération par lequel lesprit isole
de certaines réalités données dans lexpérience
un ensemble dominant et stable de caractères
communs quon désigne par le même mot qui sert
alors à désigner des objets ayant la même
fonction - Conception
- opération par laquelle lesprit forme à partir de
lexpérience la représentation dun objet de
pensée - Résultat de cette opération
- Conceptualisation
- Opération intellectuelle distincte de
limagination par laquelle lentendement forme le
concept
51Définitions, concepts, hypothèses
- Définir, cest délimiter en écartant des éléments
dès le départ du centre de létude - En caractérisant ceux qui sont inclus dans le
champ de lobservation par une ou plusieurs
propriétés communes.
52Défini versus indéfini
- Défini soppose ainsi à indéfini et
- indéfini renvoie à lidée dun objet illimité
tandis que le fini pourrait être fini ou limité
cest-à-dire être indéterminé entre ces limites
(le nombre de feuilles sur une plante) - qui sentend en compréhension et non extension le
nombre dindividus dans lespèce humaine est
indéfini car il nest pas défini par le concept
de lespèce - Lindéfini soppose alors au défini comme
linfini au fini - la notion se dédouble dailleurs en allemand en
deux notions utilisant - pour lune la métaphore de lespace Unbegrenzt
sans frontière sans borne - Pour lautre une métaphore temporelle dans un
temps perçu comme linéaire Unendlich sans fin
53Infini, défini
- infini Ce en quoi de toutes parts je ne
rencontre point de limites Dieu - Mais pour les choses où, sous quelque
considération seulement je ne vois point de fin,
comme létendue des espaces imaginaires, la
multitude des nombres, la divisibilité des
parties et de la quantité et autres choses
semblables, je les appelle définies et non pas
infinies parce que de toutes parts elles ne sont
pas sans fin et sans limites. Réponses aux
premières objections, 10 Descartes
54Induction, déduction
- Amener conduire vers
- Raisonnement par lequel on passe du particulier à
luniversel, du spécial au général de la
connaissance des faits à celles des lois - Induction peut-être empiriste on passe alors
- de la régularité des observations à leur
constance - de la constance de celles-ci à lexistence
dautres faits non donnés mais régulièrement liés
aux premiers dans les expériences antérieures - généralisation à lespèce entière des
observations faites sur plusieurs cas concordants
55Induction, déduction suite
- Induction rationaliste
- découverte dune relation invariable entre les
faits ou loi - problème passage des faits toujours particuliers
à la loi toujours universelle cest-à-dire
valable en tous lieux en tous temps et pour tous
les esprits - Déduction
- action demmener à partir de /passage de
limplicite à lexplicite - formelle Raisonnement ou inférence qui consiste
à tirer dune ou plusieurs propositions données
une autre proposition qui en est la conséquence
nécessaire et qui était implicitement impliquée
syllogisme - constructive ou hypothético déductive. On
démontre quune chose est conséquence dune autre
pour cela on construit la conséquence avec
lhypothèse démonstration - Chez Descartes soppose à lintuition qui est
laperception immédiate en un seul acte de
lesprit (uno intuitu) de la relation entre la
conséquence et le principe Règles pour la
direction de lesprit XI
56Compréhension versus ex-tension
- Compréhension ensemble des qualités ou des
caractères essentiels communs appartenant à un
terme ou à un concept qui sexprime par la
définition quand un terme est contenu par
extension dans un autre (Socrate/ grec) le
second est contenu en compréhension dans le
premier lextension et la compréhension dun
concept sont en raison inverse lun de lautre
Grec compréhension mini extension maximale
Socrate compréhension maximale extension
minimale car son extension est lunité - Compréhensionmode de connaissance intuitif et
synthétique explication connaissance analytique
et discursive qui procède par décomposition et
reconstruction des concepts
57Concepts et conceptions
- Concept
- action de contenir idée abstraite générale,
résultat de lopération par lequel lesprit isole
de certaines réalités données dans lexpérience
un ensemble dominant et stable de caractères
communs quon désigne par le même mot qui sert
alors à désigner des objets ayant la même
fonction - Conception
- opération par laquelle lesprit forme à partir de
lexpérience la représentation dun objet de
pensée - Résultat de cette opération
- Conceptualisation
- Opération intellectuelle distincte de
limagination par laquelle lentendement forme le
concept
58Définitions, concepts, hypothèses
- Définir, cest délimiter en écartant des éléments
dès le départ du centre de létude - En caractérisant ceux qui sont inclus dans le
champ de lobservation par une ou plusieurs
propriétés communes.
59Défini versus indéfini
- Défini soppose ainsi à indéfini et
- indéfini renvoie à lidée dun objet illimité
tandis que le fini pourrait être fini ou limité
cest-à-dire être indéterminé entre ces limites
(le nombre de feuilles sur une plante) - qui sentend en compréhension et non extension le
nombre dindividus dans lespèce humaine est
indéfini car il nest pas défini par le concept
de lespèce - Lindéfini soppose alors au défini comme
linfini au fini - la notion se dédouble dailleurs en allemand en
deux notions utilisant - pour lune la métaphore de lespace Unbegrenzt
sans frontière sans borne - Pour lautre une métaphore temporelle dans un
temps perçu comme linéaire Unendlich sans fin
60Infini, défini
- infini Ce en quoi de toutes parts je ne
rencontre point de limites Dieu - Mais pour les choses où, sous quelque
considération seulement je ne vois point de fin,
comme létendue des espaces imaginaires, la
multitude des nombres, la divisibilité des
parties et de la quantité et autres choses
semblables, je les appelle définies et non pas
infinies parce que de toutes parts elles ne sont
pas sans fin et sans limites. Réponses aux
premières objections, 10 Descartes
61Induction, déduction
- Amener conduire vers
- Raisonnement par lequel on passe du particulier à
luniversel, du spécial au général de la
connaissance des faits à celles des lois - Induction peut-être empiriste on passe alors
- de la régularité des observations à leur
constance - de la constance de celles-ci à lexistence
dautres faits non donnés mais régulièrement liés
aux premiers dans les expériences antérieures - généralisation à lespèce entière des
observations faites sur plusieurs cas concordants
62Induction, déduction suite
- Induction rationaliste
- découverte dune relation invariable entre les
faits ou loi - problème passage des faits toujours particuliers
à la loi toujours universelle cest-à-dire
valable en tous lieux en tous temps et pour tous
les esprits - Déduction
- action demmener à partir de /passage de
limplicite à lexplicite - formelle Raisonnement ou inférence qui consiste
à tirer dune ou plusieurs propositions données
une autre proposition qui en est la conséquence
nécessaire et qui était implicitement impliquée
syllogisme - constructive ou hypothético déductive. On
démontre quune chose est conséquence dune autre
pour cela on construit la conséquence avec
lhypothèse démonstration - Chez Descartes soppose à lintuition qui est
laperception immédiate en un seul acte de
lesprit (uno intuitu) de la relation entre la
conséquence et le principe Règles pour la
direction de lesprit XI
63Compréhension versus ex-tension
- Compréhension ensemble des qualités ou des
caractères essentiels communs appartenant à un
terme ou à un concept qui sexprime par la
définition quand un terme est contenu par
extension dans un autre (Socrate/ grec) le
second est contenu en compréhension dans le
premier lextension et la compréhension dun
concept sont en raison inverse lun de lautre
Grec compréhension mini extension maximale
Socrate compréhension maximale extension
minimale car son extension est lunité - Compréhensionmode de connaissance intuitif et
synthétique explication connaissance analytique
et discursive qui procède par décomposition et
reconstruction des concepts
64Quel progrès et but en sciences de lhomme?
- Le travail scientifique est solidaire d'un
progrès. () Car quel est le destin, ou plutôt la
signification à laquelle est soumis et
subordonné, en un sens tout à fait spécifique,
tout travail scientifique, comme d'ailleurs aussi
tous les autres éléments de la civilisation qui
obéissent à la même loi ? C'est que toute œuvre
scientifique achevée n'a d'autre sens que celui
de faire naître de nouvelles questions elle
demande donc à être dépassée et à vieillir. Celui
qui veut servir la science doit se résigner à ce
sort. () Mais dans les sciences, je le répète,
non seulement notre destin, mais encore notre but
à nous tous est de nous voir un jour dépassés.
Nous ne pouvons accomplir un travail sans espérer
en même temps que d'autres iront plus loin que
nous. En principe ce progrès se prolonge à
l'infini . - Max Weber, Le savant et le politique, première
partie, Le métier et la vocation de savant,
http//fr.wikisource.org/wiki/Le_Savant_et_le_Poli
tique,_PremiC3A8re_Partie
65Lethnocentrisme
- L'attitude la plus ancienne, et qui repose sans
doute sur des fondements psychologiques solides
puisqu'elle tend à réapparaître chez chacun de
nous quand nous sommes placés jans une situation
inattendue, consiste à répudier purement et
simplement les formes culturelles morales,
religieuses, sociales, esthétiques, qui sont les
plus éloignées de celles auxquelles nous nous
identifions. "Habitudes de sauvages cela n'est
pas de chez nous ", " on ne devrait pas permettre
cela ", etc., autant de réactions grossières qui
traduisent ce même frisson, cette même répulsion,
en présence de manières de vivre, de croire ou de
penser qui nous sont étrangères.
66Barbares et civilisés
- Ainsi l'Antiquité confondait-elle tout ce qui ne
participait pas de la culture grecque (puis
gréco-romaine) sous le même nom de barbare la
civilisation occidentale a ensuite utilisé le
terme de sauvage dans le même sens. Or derrière
ces épithètes se dissimule un même jugement il
est probable que le mot barbare se réfère
étymologiquement à la confusion et à
l'inarticulation du chant des oiseaux, opposées à
la valeur signifiante du langage humain et
sauvage, qui veut dire " de la forêt ", évoque
aussi un genre de vie animale, par opposition à
la culture humaine. Dans les deux cas, on refuse
d'admettre le fait même de la diversité
culturelle on préfère rejeter hors de la
culture, dans la nature, tout ce qui ne se
conforme pas à la norme sous laquelle on vit.
...
67Ethnocentrisme et intolérance symétriques?
- Ainsi se réalisent de curieuses situations où
deux interlocuteurs se donnent cruellement la
réplique. Dans les Grandes Antilles, quelques
années après la découverte de l'Amérique, pendant
que les Espagnols envoyaient des commissions
d'enquête pour rechercher si les indigènes
possédaient ou non une âme, ces derniers
s'employaient à immerger des blancs prisonniers
afin de vérifier par une surveillance prolongée
si leur cadavre était ou non, sujet à la
putréfaction. - Cette anecdote à la fois baroque et tragique
illustre bien le paradoxe du relativisme culturel
(que nous retrouverons ailleurs sous d'autres
formes) c'est dans la mesure même où l'on
prétend établir une discrimination entre les
cultures et les coutumes que l'on s'identifie le
plus complètement avec celles qu'on essaye de
nier. En refusant l'humanité à ceux qui
apparaissent comme les plus "sauvages" ou "
barbares " de ses représentants, on ne fait que
leur emprunter une de leurs attitudes typiques. - Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la
barbarie.
68Le racisme selon CLS
- . Le racisme est une doctrine qui prétend voir
dans les caractères intellectuels et moraux
attribués à un ensemble d'individus, de quelque
façon qu'on le définisse, l'effet nécessaire d'un
commun patrimoine génétique. On ne saurait ranger
sous la même rubrique, ou imputer automatiquement
au même préjugé l'attitude d'individus ou de
groupes que leur fidélité à certaines valeurs
rend partiellement ou totalement insensibles à
d'autres valeurs. Il n'est nullement coupable de
placer une manière de vivre et de penser
au-dessus de toutes les autres, et d'éprouver peu
d'attirance envers tels ou tels dont le genre de
vie, respectable en lui-même, s'éloigne par trop
de celui auquel on est traditionnellement
attaché. - Claude Levi-Strauss Le regard éloigné Plon, 1983,
préface, p. 15 à 17.
69Incommunicabilité?
- Cette incommunicabilité relative n'autorise
certes pas à opprimer ou détruire les valeurs
qu'on rejette ou leurs représentants, mais,
maintenue dans ces limites, elle n'a rien de
révoltant. Elle peut même représenter le prix à
payer pour que les systèmes de valeurs de chaque
famille spirituelle ou de chaque communauté se
conservent, et trouvent dans leur propre fonds
les ressources nécessaires à leur renouvellement.
70Rousseau et lethnologie
- Rousseau ne s'est pas borné à prévoir
l'ethnologie, il l'a fondée. D'abord de façon
pratique, en écrivant ce Discours sur l'origine
et les fondements de l'inégalité parmi les hommes
qui pose le problème des rapports entre la nature
et la culture, et où l'on peut voir le premier
traité d'ethnologie générale et ensuite, sur le
plan théorique, en distinguant, avec une clarté
et une concision admirables, l'objet propre de
l'ethnologue de celui du moraliste et de
l'historien "Quand on veut étudier les hommes,
il faut regarder près de soi mais pour étudier
l'homme, il faut apprendre à porter sa vue au
loin il faut d'abord observer les différences
pour découvrir les propriétés." (Essai sur
l'origine des langues, chap. VIII.) - Claude Levi-Strauss, "Jean-Jacques Rousseau,
fondateur des sciences de l'homme." In
Anthropologie structurale II, Plon, 1962
71Montesquieu un savant prudent
- Si, dans le nombre infini de choses qui sont dans
ce livre, il y en avait quelqu'une qui, contre
mon attente, pût offenser, il n'y en a pas du
moins qui y ait été mise avec mauvaise intention.
Je n'ai point naturellement l'esprit
désapprobateur. Platon remerciait le ciel de ce
qu'il était né du temps de Socrate et moi, je
lui rends grâce de ce qu'il m'a fait naître dans
le gouvernement où je vis, et de ce qu'il a voulu
que j'obéisse à ceux qu'il m'a fait aimer. - Je demande une grâce que je crains qu'on ne
m'accorde pas c'est de ne pas juger, par la
lecture d'un moment, d'un travail de vingt
années d'approuver ou de condamner le livre
entier, et non pas quelques phrases. Si l'on veut
chercher le dessein de l'auteur, on ne le peut
bien découvrir que dans le dessein de l'ouvrage.
72Montesquieu , premier sociologue du politique
- J'ai d'abord examiné les hommes, et j'ai cru
que, dans cette infinie diversité de lois et de
mœurs, ils n'étaient pas uniquement conduits par
leurs fantaisies. J'ai posé les principes, et
j'ai vu les cas particuliers s'y plier comme
d'eux-mêmes, les histoires de toutes les nations
n'en être que les suites, et chaque loi
particulière liée avec une autre loi, ou dépendre
d'une autre plus générale. Quand j'ai été rappelé
à l'antiquité, j'ai cherché à en prendre
l'esprit, pour ne pas regarder comme semblables
des cas réellement différents, et ne pas manquer
les différences de ceux qui paraissent
semblables. Je n'ai point tiré mes principes de
mes préjugés, mais de la nature des choses .
73Montesquieu un démocrate du savoir
- Je n'écris point pour censurer ce qui est établi
dans quelque pays que ce soit. Chaque nation
trouvera ici les raisons de ses maximes et on en
tirera naturellement cette conséquence, qu'il
n'appartient de proposer des changements qu'à
ceux qui sont assez heureusement nés pour
pénétrer d'un coup de génie toute la constitution
d'un État. - Il n'est pas indifférent que le peuple soit
éclairé. Les préjugés des magistrats ont commencé
par être les préjugés de la nation. Dans un temps
d'ignorance, on n'a aucun doute, même lorsqu'on
fait les plus grands maux dans un temps de
lumière, on tremble encore lorsqu'on fait les
plus grands biens. On sent les abus anciens, on
en voit la correction mais on voit encore les
abus de la correction même. On laisse le mal, si
l'on craint le pire on laisse le bien, si on est
en doute du mieux. On ne regarde les parties que
pour juger du tout ensemble on examine toutes
les causes pour voir tous les résultats.
74Montesquieu un esprit scientifique
- Si je pouvais faire en sorte que tout le monde
eût de nouvelles raisons pour aimer ses devoirs,
son prince, sa patrie, ses lois qu'on pût mieux
sentir son bonheur dans chaque pays, dans chaque
gouvernement, dans chaque poste où l'on se
trouve je me croirais le plus heureux des
mortels. Si je pouvais faire en sorte que ceux
qui commandent augmentassent leurs connaissances
sur ce qu'ils doivent prescrire, et que ceux qui
obéissent trouvassent un nouveau plaisir à obéir,
je me croirais le plus heureux des mortels. Je me
croirais le plus heureux des mortels, si je
pouvais faire que les hommes pussent se guérir de
leurs préjugés.
75Luttant contre les préjugés
- J'appelle ici préjugés, non pas ce qui fait qu'on
ignore de certaines choses, mais ce qui fait
qu'on s'ignore soi-même.J'ai bien des fois
commencé, et bien des fois abandonné cet ouvrage
j'ai mille fois envoyé aux 1 vents les feuilles
que j'avais écrites, je sentais tous les jours
les mains paternelles tomber 2 je suivais mon
objet sans former de dessein je ne connaissais
ni les règles ni les exceptions je ne trouvais
la vérité que pour la perdre. Mais, quand j'ai
découvert mes principes, tout ce que je cherchais
est venu à moi et, dans le cours de vingt
années, j'ai vu mon ouvrage commencer, croître,
s'avancer et finir. - 1 Ludibria ventis.
- 2 Bis patriœ cecidere manus
76Le moment tocquevillien
- http//classiques.uqac.ca/classiques/De_tocquevill
e_alexis/democratie_1/democratie_1_intro.html - Une édition électronique réalisée à partir de la
13e édition du livre dAlexis de Tocqueville
(1835), Démocratie en Amérique I publiée du
vivant de l'auteur. http//classiques.uqac.ca/clas
siques/De_tocqueville_alexis/democratie_1/democrat
ie_1_intro.html - Parmi les objets nouveaux qui, pendant mon séjour
aux États-Unis, ont attiré mon attention, aucun
n'a plus vivement frappé mes regards que
l'égalité des conditions. Je découvris sans peine
l'influence prodigieuse qu'exerce ce premier fait
sur la marche de la société il donne à l'esprit
public une certaine direction, un certain tour
aux lois aux gouvernants des maximes nouvelles,
et des habitudes particulières aux gouvernés.
Bientôt je reconnus que ce même fait étend son
influence fort au-delà des mœurs politiques et
des lois, et qu'il n'obtient pas moins d'empire
sur la société civile que sur le gouvernement il
crée des opinions, fait naître des sentiments,
suggère des usages et modifie tout ce qu'il ne
produit pas. Ainsi donc, à mesure que j'étudiais
la société américaine, je voyais de plus en plus,
dans l'égalité des conditions, le fait générateur
dont chaque fait particulier semblait descendre,
et je le retrouvais sans cesse devant moi comme
un point central où toutes mes observations
venaient aboutir.
77La révolution démocratique
- Alors je reportai ma pensée vers notre
hémisphère, et il me sembla que j'y distinguais
quelque chose d'analogue au spectacle que
m'offrait le nouveau monde. Je vis l'égalité des
conditions qui, sans y avoir atteint comme aux
États-Unis ses limites extrêmes, s'en rapprochait
chaque jour davantage et cette même démocratie,
qui régnait sur les sociétés américaines, me
parut en Europe s'avancer rapidement vers le
pouvoir. De ce moment j'ai conçu l'idée du livre
qu'on va lire. - Une grande révolution démocratique, s'opère parmi
nous tous la voient, mais tous ne la jugent
point de la même manière. Les uns la considèrent
comme une chose nouvelle, et, la prenant pour un
accident, ils espèrent pouvoir encore l'arrêter
tandis que d'autres la jugent irrésistible, parce
qu'elle leur semble le fait le plus continu, le
plus ancien et le plus permanent que l'on
connaisse dans l'histoire.
78Les trois démentis
- "Dans le cours des siècles, la science a infligé
à l'égoïsme naïf de l'humanité deux graves
démentis. La première fois, ce fut lorsqu'elle a
montré que la terre, loin d'être le centre de
l'univers, ne forme qu'une parcelle insignifiante
du système cosmique dont nous pouvons à peine
nous représenter la grandeur. Cette première
démonstration se rattache pour nous au nom de
Copernic, bien que la science alexandrine' ait
déjà annoncé quelque chose de semblable.Le
second démenti fut infligé à l'humanité par la
recherche biologique, lorsqu'elle a réduit à rien
les prétentions de l'homme à une place
privilégiée dans l'ordre de la création, en
établissant sa descendance du règne animal et en
montrant l'indestructibilité de sa nature
animale. Cette dernière révolution s'est
accomplie de nos jours, à la suite des travaux de
Ch. Darwin, de Wallace' et de leurs
prédécesseurs, travaux qui ont provoqué la
résistance la plus acharnée des contemporains.
Un troisième démenti sera infligé à la
mégalomanie humaine par la recherche
psychologique de nos jours qui se propose montrer
au moi qu'il n'est seulement pas maître dans sa
propre maison, qu'il en est réduit à se contenter
de renseignements rares et fragmentaires sur ce
qui se passe, en dehors de sa conscience, dans sa
vie psychique. Les psychanalystes ne sont ni les
premiers ni les seuls qui aient lancé cet appel à
la modestie et au recueillement, mais c'est à eux
que semble échoir la mission d'étendre cette
manière de voir avec le plus d'ardeur et de
produire à son appui des matériaux empruntés à
l'expérience et accessibles à tous. D'où la levée
générale de boucliers contre notre science,
l'oubli de toutes les règles de politesse
académique, le déchaînement d'une opposition qui
secoue toutes les entraves d'une logique
impartiale". - Freud, Introduction à la psychanalyse, 1916 (
traduction française , 1970 cité in Paris,
édition Payot page 266.