Title: Ethique du d
1On voit abattre des forêts qui ont donné leur
bois depuis des millénaires. On voit tuer un
beau matin la poule aux oeufs dor, dont la chair
servira à préparer des bouillons populaires qui
ne rassasient personne. Jünger E. (Traité
du rebelle ou le recours aux forêts).
Lerreur est-elle boréale ? Les racines dune
controverse socio-environnementale qui perdure
Nicole HuybensProfesseureDESS
Eco-ConseilDépartement des sciences
fondamentales
2Plan
- Introduction
- Une controverse qui perdure
- La forêt symbole
- la relation homme - nature
- Conclusion
3Introduction
- Quand on voit un arbre, on ne pense pas
nécessairement à ses racines, pourtant il en a,
même si parfois ce nest pas très important de
les connaître. - Pour comprendre pourquoi un arbre tombe plus
facilement sous leffet du vent, connaître son
système racinaire fournit une explication
intéressante - Ce que les biologistes font avec les arbres, je
le fais avec les humains que les arbres
préoccupent.
4Une controverse qui évolue à peine
- Les sentiments sont  irrationnels , les prises
de positions sont motivées par un manque
dinformation ou des informations fausses,
orientées, manipulées ! - Le seul remède (pour tous les acteurs !), cest
de diffuser la Vérité environnementale,
scientifique et économique (la leur) - Mais la nature pour les humains daujourdhui est
aussi un espace où sinscrivent toutes sortes
dimaginaires étrangers à toute idée de gestion - Et donc, 180 articles de journaux plus tard
- On tourne à peu près en rond !
5 Partir où personne ne partÂ
- Je vous embarque dans limaginaire, les symboles,
léthique - Des clés supplémentaires pour comprendre et voir
le problème autrement. - Trouver dautres solutions
6Une controverse virulente et qui perdure
- Quels temps,
- Que ceux où parler des arbres est presque un
crime - Parce que cest faire silence sur tant de
forfaits ! - Brecht (A ceux qui naîtront après nous, 1937).
7Une controverse complexe
- Polarisée On coupe trop, on coupe mal, on gère
mal / On coupe et on gère de mieux en mieux. - Sociale (GIR, Autochtones, régions, emplois,
forêts adaptées aux usines) - Environnementale (possibilité forestière, aires
protégées, biodiversité, vieilles forêts
primaires). - Inclut une contestation du système économique et
une remise en question majeure des lois
8Des réponses complexes
- Décisions se démocratisent, consultations de plus
en plus transparentes, pratiques évoluent,
gestion écosystémique se concrétise,
certifications forestières se généralisent - Et pourtant la controverse perdure
- Les acteurs continuent à senvoyer des noms
doiseaux par médias interposés - Les combats sont virulents, les débats
omniprésents et les dialogues moins visibles
9Ce qui me frappe
- Controverse réapparaît malgré les nombreuses
modifications à la loi et aux pratiques - La réponse légale est lente, complexe et
difficile à faire comprendre - Les activités de coupe sont dénigrées
- La forêt boréale est centrale
- Pas de consensus scientifique sur lécologie de
la forêt boréale - Pas dacteurs crédibles pour lensemble des
parties - Les aspects symboliques sont bafoués, les
émotions mal explicitées, dénigrées et peu prises
en compte - Aucun dialogue sur léthique
10ET DONC ?
- Je ne suis pas certaine que des décisions basées
uniquement sur la science et léconomie sont
suffisantes - Je ne pense pas que communiquer sur ces décisions
soit suffisant - Un travail  sur les racines est à accomplir
pour les aspects symboliques - Il faut aussi considérer les émotions comme
valides dans les prises de décision - Il faut revisiter la relation homme - nature et
léthique des interventions des humains dans la
nature
11La forêt symbole
La forêt, à la gentillesse et à la bienveillance
illimitée, offre son ombre même aux bûcherons
qui la détruisent Gautama Bouddha
12Les symboles
- Un élément du réel objectivable (une forêt)
révèle ou explique un  mystère intangible,
issu de lintuition des hommes (la régulation
parfaite). - Ils donnent du sens, répondent à des
interrogations humaines fondamentales (Pourquoi
le monde ? Quest-ce que lhomme ? Pourquoi la
vie, la mort ? Doù venons-nous, quest-ce que
nous faisons ici ? Dieu existe-t-il ?) - Patrimoine universel de linconscient collectif
13La forêt symbolise
- LA Nature
- Abondance, symbole nourricier et protection
(richesse refuge) - Vie, résurrection et renaissance, immortalité,
fécondité et santé (médicaments naturels santé,
arbres - poumons, lieu de ressourcement) - Pureté et harmonie, ordre sacré et régulation
parfaite - Connaissances lieu et source (spiritualité,
sciences) - Sauvage, spontané (peur ou admiration, couper un
arbre, cest la culture qui prend le pas sur la
nature, le réfléchi sur le spontané, la raison
sur les émotions) - Relie lhomme à Dieu et à la nature
- Larbre  comme un humain racines de
linconscient, branches de la connaissance et
sommet de la spiritualité Jadis les arbres
étaient des gens comme nous mais plus solides,
plus heureux, plus amoureux peut-être, plus
sages. Prévert J. (Arbres)
14Pour des acteurs de la controverse
- Ce qui est en danger dans la forêt boréale, ce
sont les forêts primaires, symboles dharmonie.
Non touchées par lhomme, elles restent pures.
Le feu, phénomène naturel rajeunit la forêt
immortelle. Une coupe la souille à tout jamais,
empêche sa régulation parfaite - Le réfléchi (la coupe) qui prend le pas sur le
spontané (la nature), cétait très bien à la
Renaissance mais pas pour les philosophes de la
nature du 19ème siècle et pour limaginaire
daujourdhui.
15Au niveau symbolique
- Lutter contre la coupe forestière, cest
- valoriser la vie, le sauvage, lirréfléchi, la
pureté, la virginité, la santé, la régulation
parfaite de la nature ou de Dieu (le sacré) - sopposer à la science et à ses techniques (leurs
effets négatifs), au réfléchi, au raisonné, à la
culture, à la raison humaine, à la  coupureÂ
entre lhomme et la nature.
16Sciences et symboles
- Les arbres ne sont pas les poumons de la planète
les hommes respirent mieux en forêt - La forêt nest ni pure, ni harmonieuse, ni
parfaitement régulée distinguer le symbole
dharmonie et le fonctionnement objectif de
lécosystème. - Nier certains niveaux de réalités des humains ou
vouloir les remplacer par des raisonnements
scientifiques ou économiques ne les fait pas
disparaître - Il faut donc trouver comment intégrer cette
réalité dans la gestion forestière
17La relation homme- nature
- Philosophie éthique des interventions de lhomme
dans la nature
18Distinguer
- Esthétique le beau, le laid
- Science le vrai, le faux
- Droit le permis et linterdit
- Ethique le bien et le mal
- Symbolique spiritualité et imaginaire
19- Une CPRS est épouvantable (esthétique)
- Après un feu, les pins gris se régénèrent très
bien parce que leurs cônes semi-sérotineux sont
adaptés à cette perturbation. Après une coupe,
ils ne repoussent pas. (sciences) - La loi permet la coupe sur plusieurs hectares
dans des CAAF pour autant que les compagnies
respectent le RNI (droit) - Ce nest pas contre les feux quil faut lutter
mais contre les hommes qui dévastent les forêts
pour faire des profits. (éthique) - Les forêts sont des modèles déquilibre, elles
sautorégulent sans les hommes (symbolique)
20Eviter la confusion des genres
- Ce qui est vrai ou faux ne remplace pas ce qui
est bien ou mal - Science, esthétique et symbolique rendent compte
de réalités. Elles ne sappliquent pas ! - Le droit et léthique dirigent laction
21Ethique et relation homme - nature
- Ce qui est bien ou mal dans les interventions de
lhomme dans la nature est lié à une conception
de notre relation à la nature - La controverse sur la forêt nous oblige à la
revisiter - Sappuyer sur les différentes visions historiques
et les dépasser lhomme daujourdhui dans la
nature daujourdhui
22Traditionnellement
- Lhomme dans la nature lhomme et la nature ne
font quun, le cercle de la Vie, cohabitation,
alliance, association, symbiose (Celtes,
Amérindiens, Bouddhistes) - Lhomme au-dessus de la nature hors nature, il
est le couronnement de la création, la culture.
La nature est chaos, instrumentalisée et
domestiquée (tradition judéo-chrétienne)
vision biocentrique
vision anthropocentrique
23Aujourdhui
-  lhomme-hors-nature se sert des  ressources
naturelles pour satisfaire ses besoins
vision anthropocentrique -  lhomme-mort-nature toute intervention
humaine dans la nature la dénature
vision biocentrique -  Lhomnature invente des stratégies dalliance
avec elle pour en vivre et lui donne des droits
vision écocentrique -  Lhomme avec la nature doit actualiser
lénigme de son existence dans la nature par sa
conscience, ses devoirs, ses responsabilités et
son amour vis-à -vis de la nature - vision  multicentriqueÂ
24En métaphores !
- Les arbres matures non récoltés sont perdus pour
tout le monde (anthropocentrique) - Lhomme na pas de place dans la nature, sauf si
on croit en Dieu (biocentrique) - Une gestion acceptable imite la nature
(écocentrique) - Les hommes sont parties prenantes de lévolution
et partenaires avec la nature. Sans leur
conscience, la nature na pas déthique. Sans
elle, ils ne peuvent pas vivre (multicentrique)
25Les hommes daujourdhui dans la nature
daujourdhui
- Ethique anthropocentrique trop deffets pervers
- Ethique biocentrique impossible
- Ethique écocentrique très difficile, lhomme
est  énigmatique - Ethique multicentrique à construire et Ã
reconstruire tous les jours, accepter la
complexité et la démocratie cognitive.
26Conclusion
- Les discours des acteurs sociaux font une place
importante aux revendications environnementales,
économiques et sociales. - Mais lunivers symbolique et léthique sont
absents des dialogues - Les humains sont faits de toutes ces choses !
27Vrai /faux ET bien/mal
- La controverse socio-environnementale sur la
forêt boréale nest pas seulement une lutte entre
le vrai et le faux. - Cest plutôt une tentative qui perdure pour
distinguer le bien et le mal des interventions de
lhomme dans la nature. - Elle est notamment le symptôme de cette
difficulté que nous avons de nous situer comme
humain daujourdhui dans la nature daujourdhui
28Communiquer ?
- Qui doit communiquer quoi ?
- Qui seraient des acteurs crédibles ?
- Une image vaut 400 mots quels mots ?
- Comprendre
- Et dialoguer
29Un réel dialogue
- Sinspirer des sciences, parler de léthique et
des symboles - Trouver les mots pour les émotions,
bienveillance, amour - Redéfinir les devoirs des hommes par rapport à la
nature - Lerreur nest pas boréale elle consisterait Ã
continuer à faire seulement ce que nous avons
fait jusquà présent oublier les racines de la
controverse.
30Références
- Brosse J., L'aventure des forêts en Occident, de
la préhistoire à nos jours, JC Lattès, 2000. - Camerini C., Les fondements épistémologiques du
développement durable. Entre physique,
philosophie et éthique. L'Harmattan, ouverture
philosophique, 2003 - Defurnaux R., Les cathédrales sauvages. De la
philosophie de la nature et des espaces protégés.
L'Harmattan, ouverture philosophique, 2004.
Farago F., La nature, Armand Collin, 2000. - Fournier L., Le rire des arbres, les pleurs des
forêts, Hull, Lanctôt Editeur, 2003. - Genot J.C, Quelle éthique pour la nature ?,
Edisud, 2003 - Girard M., Les symboles dans la Bible, Bellarmin,
Montréal 1991. - Jonas H., Pour une éthique du futur. Editions
Payot et Rivages. (1998 pour la traduction
française, 1993 pour la version allemande) - Ki-Zerbo J., Compagnons du soleil, anthologie de
grands textes de lhumanité sur les rapports
entre lhomme et la nature, Paris, La
Découverte/UNESCO, 1992. - Létourneau J. et Montal F., La forêt imaginée,
dans Forêt verte, planète bleue, Fides, 1994. - Morin E., La méthode 6. Ethique. Paris, Seuil,
2004. - Peelman A. (1992). Le Christ est amérindien.
Outremont, Novalis, 1992. - Reeves, De Rosnay, Coppens, Simonet, La plus
belle histoire du monde, Seuil, 1996 - Reeves H. , Lenoir F., Mal de terre, Seuil,
science ouverte, 2003. - Serres M., Le contrat naturel, Ed F. Bourin,
Paris, 1990. - Suzuki D. (2001). Léquilibre sacré.
Redécouvrir sa place dans la nature. Fides, 2001.
31Marcher dans une forêt entre deux haies de
fougères transfigurées par lautomne, cest cela
un triomphe. Que sont à côté suffrages et
ovations ? Cioran (De linconvénient dêtre né)
MERCI