Title: Le conseil d
1Le conseil dadministration sur la sellette
- Les devoirs des administrateurs à la lumière de
la jurisprudence récente - Association du jeune Barreau de Montréal
- 12 décembre 2007
- Stéphane Rousseau
2Contexte
- Traditionnellement, lintensité et la portée des
devoirs des administrateurs ont été relativement
mitigées. - Peu de cas de responsabilité, hormis les cas de
fraude, de malhonnêteté ou de conflits dintérêts.
3Administrateurs de société sinécure
- like a permanent warm bath
- No effort of any kind is called for. You go to
a meeting once a month in a car supplied by the
company. You look both grave and sage. - Lord Boothby
4Événements changeant cette réalité
- Vagues de scandales financiers aux États-Unis et
au Canada - Recours de nature pénale et criminelle
- Changement dattitudes à légard des dirigeants
et des administrateurs
5Événements changeant cette réalité
- Réforme réglementaires nouvelles normes
destinées à améliorer la gouvernance - Évolution de la conception judiciaire des devoirs
des administrateurs. - Modification de la portée et du contenu des
devoirs des administrateurs.
6Contexte
- Objectifs
- Présenter lévolution récente des devoirs des
administrateurs - Identifier les changements qui sopèrent dans la
jurisprudence - Réfléchir à limpact de ces changements
- Pour les administrateurs
- Pour les conseillers juridiques.
7Toile de fond larrêt Wise
- Wise acquiert Peoples
- Intégration des opérations des entreprises
- Politique dapprovisionnement commune
- Partage des responsabilités
- Peoples est désavantagée
- Wise entraîne Peoples dans des difficultés
financières, puis la faillite
8Toile de fond larrêt Wise
- Recours en responsabilité par le syndic contre
les administrateurs de Wise - Allègue manquements aux devoirs de prudence,
diligence et loyauté ayant causé un préjudice aux
créanciers - Jugements
- Cour supérieure administrateurs responsables
- Cour dappel administrateurs exonérés
- Cour suprême administrateurs exonérés.
9Vue densemble
- Impact et suites de larrêt Wise
- Devoir de prudence et diligence
- Resserrement de la norme de conduite
- Étendue de la portée du devoir
- Formalisation de la règle de lappréciation
commerciale - Devoir de loyauté
- Revirement jurisprudentiel quant à
linterprétation du concept de lintérêt de la
société.
10La nouvelle trajectoire du devoir de prudence et
diligence
11La norme de conduite de référence
- Devoir dagir avec le soin, la diligence et la
compétence dont ferait preuve, en pareilles
circonstances, une personne prudente (art.
122(1)b) LCSA). - Norme de conduite de référence?
- Objective
- Subjective
12La norme de conduite de référence
- Approche antérieure à Wise une norme mixte
- la norme de prudence est partiellement objective
(la norme de la personne raisonnable) et
partiellement subjective étant donné que la
personne raisonnable est définie en fonction des
connaissances et de lexpérience de lintéressé.
- Soper c. Canada, 1998 1 C.F. 124, 145
(C.A.F.). - Modulation en fonction des caractéristiques
personnelles impliquait une variation dans
lintensité du devoir favorisant les néophytes.
13La norme de conduite de référence
- Wise renverse cette interprétation
- Norme est objective
- Personne raisonnable et non administrateur
raisonnable - Absence de considération des caractéristiques
personnelles - Administrateur ayant des connaissances et une
expérience - Administrateur néophyte
14La norme de conduite de référence
- Mais prise en compte des éléments factuels du
contexte dans lequel agissent ladministrateur - Particularités de la société taille, situation
financière - Poste occupé administrateur interne/externe
comités - Re Standard Trustco Ltd (1992)
- Bonnes pratiques de gouvernance
- Greenlight Capital Inc. c. Stronach (C.S.
Ont.,2006)
15La norme de conduite de référence
- Impact pour les sociétés régies par la LCQ
- Art. 322 C.c.Q.
- Norme de conduite de référence différente?
- Le tribunal est davis que les articles 322 et
2138 C.c.Q. ... imposent des obligations
équivalentes. - Société dhabitation des Vieilles Forges inc.
c. Béliveau (C.S., Que., 2006)
16Manifestation dun resserrement du devoir de
prudence et diligence
- Obligation de surveillance
- Approche traditionnelle obligation de
surveillance individuelle restreinte - Ladministrateur est fondé à présumer, sauf sil
a des motifs raisonnables de le soupçonner, que
le dirigeant sacquitte de ses fonctions avec
intégrité - In re City Equitable Fire Insurance Co., 1925 1
Ch. 407 - Ne signifiait pas pour autant une absence de
surveillance
17Manifestation dun resserrement du devoir de
prudence et diligence
- Obligation de surveillance individuelle
- Une personne capable dintervenir pour empêcher
la commission dun fait dommageable et apte à le
faire, mais qui omet de le faire qui saveugle
volontairement engage sa responsabilité à
légard de la victime - Richer c. Vaillancourt (2006, CSQ)
- Robert Szöghy mentionne qu'il s'est joint à
Airmax à titre de chimiste, que les affaires ne
l'intéressent pas, qu'il est incapable de lire
des états financiers, bref qu'il n'a rien vu,
qu'il n'a jamais demandé à Martin Auger de lui
rendre compte, qu'il lui faisait confiance.
De l'avis du Tribunal, il y a là ici une forme
d'aveuglement volontaire incompatible avec le
devoir de diligence - Airmax Environnement Inc. c. Auger (2006, CSQ)
18Manifestation dun resserrement du devoir de
prudence et diligence
- Obligation de surveillance institutionnelle
mécanismes dinformation et de gestion des
risques - Sassurer de lexistence et du bon
fonctionne-ment du système de surveillance des
opérations financières - 484887 Alberta Inc. c. Faraci, 2002 A.J. (QL)
No. 522 (Q.B.). - Mesures ou vérifications qui devaient être
discutées et adoptées afin déviter des
poursuites éventuelles particulièrement à la
lumière des antécédents dArthur. - Métromédia CMR Montréal inc. c. Johnson,
(C.A., 2006) - Filion c. Chiasson (C.A., 2007)
19Manifestation dun resserrement du devoir de
prudence et diligence
- Obligation de se renseigner
- Obtenir tous les renseignements raisonnablement
disponibles relatifs à la décision à prendre - Informations provenant des dirigeants
circonspection - Consultation dexperts ou de professionnels
- Art. 123(4) L.C.S.A.
- Art. 123.84 L.C.Q.
20Manifestation dun resserrement du devoir de
prudence et diligence
- Consultation dexperts ou de profession-nels
mise en garde - Qui sont-ils?
- Pour la L.C.S.A., larrêt Wise établit que ce
sont les membres dune profession seulement - Pour la L.C.Q., référence au concept dexpert.
- Portée de lexonération les leçons de Repap
- Obligation de suivre un processus décisionnel
prudent et diligent - Supervision de la confection du rapport
- Lecture et analyse du rapport
21Élargissement de la portée du devoir de prudence
et diligence
- Qui est le bénéficiaire du devoir de prudence et
diligence? - Approche traditionnelle la société est la seule
bénéficiaire - Principe fondamental mis de côté par Wise par une
analyse textuelle de la loi - Puisque le bénéficiaire de l'obligation de
diligence est identifié de façon beaucoup plus
générale il semble évident qu'il faut y
inclure les créanciers.
22Portée du devoir de prudence et diligence selon
Wise
23Conséquences de cette portée élargie du devoir de
prudence et diligence
- Action oblique perd de sa pertinence
- Rôle de lart. 1457 C.c.Q.
- Impact pour les actionnaires exigence dun
préjudice autonome et direct - Accroissement potentiel de la responsabilité des
administrateurs à légard des créanciers en cas
dinexécution contractuelle par leur société - Méthot c. Banque fédérale de développement du
Canada (2006, CAQ) (créancier hypothécaire) - Société dhabitation des Veilles Forges inc. c.
Béliveau (2006, CSQ) (créancier hypothécaire)
24Conséquences de cette portée élargie du devoir de
prudence et diligence
- Situation antérieure à Wise lapproche
restrictive de la jurisprudence - Nécessité de prouver une faute autonome de
lobligation contractuelle de la société. - Faute simple était insuffisante. Les créanciers
devaient établir une faute caractérisée des
administrateurs qui - se trouvait à mi-chemin entre un comportement
discutable et un comportement frauduleux ou
abusif.
25Conséquences de cette portée élargie du devoir de
prudence et diligence
- En appliquant lart. 122(1)b) L.C.S.A. dans le
cadre de lart. 1457 C.c.Q., Wise vient établir
que cest le critère de faute simple qui
sapplique. - Méthot c. Banque fédérale de développement du
Canada (2006, CAQ) - Société dhabitation des Veilles Forges inc. c.
Béliveau (2006, CSQ)
26La règle de lappréciation commerciale
- Déférence des tribunaux à légard des décisions
daffaires prises - il convient de répéter que lon nexige pas
deux la perfection. Les tribunaux ne doivent
pas substituer leur opinion à celle des
administrateurs qui ont utilisé leur expertise
commerciale pour évaluer les considérations qui
entrent dans la prise de décisions des sociétés.
- Wise
27La règle de lappréciation commerciale
- Conditions dapplication de la règle
- Processus décisionnel raisonnablement prudent et
diligent - Décision raisonnable
- Démontrer quune autre option pouvait
effectivement être réalisée et était
manifestement plus avantageuse pour lentreprise
que celle qui a été choisie.
28La règle de lappréciation commerciale
- Application
- Ladoption de la politique dapprovisionnement
était une décision daffaires raisonnable prise
en vue de corriger un problème dordre commercial
grave et urgent dans un cas où il nexistait
peut-être aucune solution. - Wise
- The court can examine the decisions made by the
Board in regard to the spin off, but it cannot
simply substitute its opinion to that of the
Board. The Supreme Court of Canada has taken
Canadian courts in the direction of the American
jurisprudence, requiring deference to business
decisions in accordance to the business judgment
rule - Hooper c. MDS (Canada) inc. (2007, C.S. Que.)
-
29La règle de lappréciation commerciale
- MÉTHOT, en décidant en tant qu'administrateur de
déménager les équipements des usines l'a fait
dans l'intérêt des compagnies. Rien ne démontre
que MÉTHOT a agi de mauvaise foi. Il croyait en
ce faisant améliorer leur situation et profiter
d'un plus grand marché Certes, il aurait dû
prendre connaissance des actes de prêts lorsque
sa compagnie de gestion, 178035 est devenue
actionnaire de CUISICHEF mais il ne l'a pas
fait. Cela n'est pas suffisant pour que sa
responsabilité soit retenue en raison de
l'omission ci-avant rapportée. - La décision de MÉTHOT et de OUELLET de
déménager les équipements des usines de
St-Jean-Port-Joli et de Montmagny à celle de
St-Charles de Bellechasse n'est pas un manquement
à leur obligation de diligence. Cette décision
peut s'expliquer au moment où elle a été prise
même si cela n'a pas donné le résultat
recherché. - Méthot c. Banque fédérale de développement du
Canada (2006, C.A.Que.)
30Portée de la règle de lappréciation commerciale
- Corporate governance decisions relate directly
to such relationships and are at the heart of the
Boards business decision-making role regarding
the corporations business and affairs. The
dynamics of such decisions, and the intricate
balancing of competing interests and other
corporate-related factors that goes into making
them, are no more within the purview of the
courts knowledge and expertise than other
business decisions, and they deserve the same
deferential approach. - Re Stelco Inc. (2005, C.A. Ont.)
- Ne sapplique pas aux décisions intéressant la
conformité à la loi. - Kerr c. Danier Leather Inc. (2007, C.S.C.)
31Le devoir de loyauté des administrateurs
- De la primauté des actionnaires à la théorie des
parties prenantes?
32La notion de lintérêt de la société
- Devoir de loyauté que signifie agir dans
lintérêt de la société? - Approche traditionnelle agir dans lintérêt des
actionnaires - de façon générale, les intérêts de la société
rejoignent ceux de l'ensemble des actionnaires,
parce que l'atteinte des objets de la société
constitue, en principe, la raison d'être de la
mise en commun des sommes investies. - Wise, Cour dappel du Québec
33Schéma traditionnel du devoir de loyauté
34Conséquences de ce modèle
- Conflits verticaux
- Abus du patrimoine de la société
- Choix en faveur des actionnaires a peu
dincidence puisque intérêt commun à réprimer ces
abus. - Conflits horizontaux
- Conflits entre les intérêts des parties prenantes
- Modèle de la primauté des actionnaires a une
incidence importante.
35Conséquences de ce modèle
- Wise et la société en situation financière
précaire position de la Cour dappel - Politique dapprovisionnement désavantage les
créanciers et avantage potentiellement les
actionnaires - Selon le modèle de la primauté des actionnaires,
conflit entre ces intérêts doit être résolu en
faveur des actionnaires - Le devoir de loyauté ne protège pas dautres
intérêts que ceux des actionnaires.
36Évolution jurisprudentielle la théorie des
parties prenantes
- Mise au rancart de la primauté des actionnaires
en faveur de la maximisation de la valeur - il ne faut pas interpréter lexpression au mieux
des intérêts de la société comme si elle
signifiait simplement au mieux des intérêts des
actionnaires - Pour déterminer sil agit au mieux des intérêts
de la société, il peut être légitime pour le
conseil dadministration, vu lensemble des
circonstances dans un cas donné, de tenir compte
notamment des intérêts des actionnaires, des
employés, des fournisseurs, des créanciers, des
consommateurs, des gouvernements et de
lenvironnement.
37Nouveau schéma du devoir de loyauté
38Mise en œuvre du devoir de loyauté certitudes et
incertitudes
- Discrétion des administrateurs de considérer les
intérêts des parties prenantes - Intérêts de la société et des parties prenantes
sont distincts - Le devoir de loyauté sadresse uniquement à la
société - Les autres parties prenantes ne peuvent
poursuivre les administrateurs pour manquement à
ce devoir, à moins dutiliser laction oblique
39Mise en œuvre du devoir de loyauté certitudes et
incertitudes
- Les administrateurs ne peuvent pas donner
préséance à un groupe de parties prenantes - Les intérêts des créanciers ne deviennent pas
prépondérants dans le voisinage de
linsolvabilité - les administrateurs doivent essayer dagir au
mieux des intérêts de la société en créant une
meilleure société, et éviter de favoriser les
intérêts dun groupe dintéressés en particulier.
- Rôle du recours pour oppression
40Mise en œuvre du devoir de loyauté certitudes et
incertitudes
- Aucune indication sur le processus darbitrage à
réaliser entre les intérêts des parties
prenantes. - Les intérêts des parties prenantes ont-ils tous
le même poids? - Si ces intérêts ne peuvent être réconciliés,
comment doivent agir les administrateurs? - Interface entre le devoir de loyauté et le
recours pour oppression. - Application dans les sociétés à capital fermé
41Réception de larrêt Wise dans le contexte des
prises de contrôle
- Maintien des devoirs Revlon
-
- There is no doubt that the directors of a
corporation that is the target of a takeover bid
or, in this case, the Trustees have a
fiduciary obligation to take steps to maximize
shareholder (or unitholder) value in the process - Ventas, Inc. v. Sunrise Senior Living Real
Estate Investment Trust (C.A. Ont., 2007) - Sterling Centrecorp Inc. (C.S. Ont. 2007)
42Conseil dadministration sur la sellette
- Rôle des devoirs responsabiliser les
administrateurs - Atteignons-nous cet objectif?
- Impact du nouveau recours en responsabilité
civile sur le marché secondaire des valeurs
mobilières
43Pour questions ou commentaires
- stephane.rousseau_at_umontreal.ca
- www.droitdesaffaires.ca