Title: Mondialisation
1Mondialisation Globalisation le regard dun
géographe
- Laurent Carroué
- Université Paris VIII
- Préparation aux concours
- APHG - Caen - 22 novembre 2006
2I. Les débats autours des concepts
3A. Mondialisation la fin des territoires ?
4A. Mondialisation la fin des territoires ?
- Hégémonie conceptuelle des économistes qui
dépolitise et déterritorialise les réalités - Théodore Levitt, Globalization en 1983 in Harvard
Busines Review in The globalisation of
Markets convergence vers marché unique dénué
de toute différenciation (Coca Cola) - Global Village de Marshall Mc Luhan en 1968 (in
War and Peace inthe Global Village ) en 1971
traduit en 1971 par village planétaire . - Travaux de Kenichi Ohmae (consultant chez Mac
Kinsey) en 1985 puis 1990 avec le concept de
firme globale et de World Compagny. - Toutes les thématiques de labolition et de
lespace - Tout cela aboutit à la fin de lhistoire , la
fin de la géographie , la fin des
territoires (cf Global Financial Integration
the end of geography de Richard OBrien
(Chatham House, London, 1992) ou The
E-Corporation The End Og Geography de Gary
Hamel et Jeff Sampler in Fortune Magazine du 7
decembre 1998. Ou encore Bertrand Badie la fin
des territoires chez Fayard en 1995
5B. Le retour de la géographie et des territoires
- Une géographie dans son siècle quel caractère
opératoire pour la discipline ? - Idée à la mode terminologie mise à toute les
sauces. Frénésie médiatique menace le concept
dobsolescence car totalement polymorphe. - Approche de la mondialisation très globalisante
dans les années 1980/1990 nouveau messianisme
de la fin de lhistoire , de la fin de la
géographie , de la fin des territoires , de
la fin des Etats , de la fin des frontières
Cf Kenichi Ohmae sur les Etats-régions par ex.
en 1996 - Cette mise en perspective dune mondialisation
globalisante, universelle, automatique et
mécanique est brutalement remise en cause au
début des années 2000 par les attentats du 1 sept
2001 et le dev. Mouvement alter-mondialiste. - De nouveaux débats sont apparus (mode uni ou
multipolaire, mode de gestion, rôle de lONU,
quelles régulations inter-étatiques). - Nouvelles demandes adressées à la géographie
comprendre la complexité du monde contemporain à
travers mobilisation dune multitude de clefs de
lectures, interactions des jeux dacteurs, rôle
des représentations et arguments géopolitiques,
réarticulation des niveaux demboitements des
échelles spatiales. - Réarticulation aussi entre espace(s) et
territoire(s) et entre géohistoire et géographie.
6C. Une nécessaire clarification méthodologique
des terminologies
- Globalisation au délà de langliscisme, le
terme globalisation doit être utilisé mais
redéfini dans un cadre plus strict la
globalisation doit sinscrire dans létude et
lanalyse de phénomènes affectant le
fonctionnement de lespace terrestre dans une
interaction entre le milieu et les sociétés
humaines. On peut alors définir la globalisation
comme létudes des interactions hommes/ nature
affectant la marche du globe le réchauffement
planétaire, la gestion des ressources
renouvelables et non renouvelables (eau,
richesses hallieutiques, énergies) ou la
question du développement durable/ soutenable
pose la question de la globalisation. - Interdépendance Parallèlement à la
mondialisation, la globalisation définie plus
haut fait que nous sommes dans un monde
aujourdhui interdépendant. Une des principales
ruptures introduite par le 3em stade de la
mondialisation est quil nexiste plus
aujourdhui despaces dexpansion géographique
pour le capitalisme. Cette finitude géographique
pose à celui-ci de redoutables problèmes
dadaptation concernant la valorisation et la
crise de suraccumulation du capital, la gestion
des concurrences, contradictions et inégalités
comme en témoignent les débats sur la question de
la gouvernance mondiale et les modes de
développement à privilégier dans un système
global interdépendant où tend à émerger une
opinion publique mondiale problèmes
environnementaux et climatiques, épuisement des
ressources, développement soutenable et
durable... - International terme qui disparaît très / trop ?
souvent des manuels et études et qui doit être
réhabilité. Il définit les relations et
interactions entre Etats au sens traditionnel de
relations internationales (logiques de puissance,
de domination, conflits, construction de
nouvelles régulations). - Universel Mais loin dêtre ubiquiste, le
processus de mondialisation forge un système
mondialisé duel, polarisé et hiérarchisé. Au plan
géographique, ce système nest en rien mondial,
cest-à-dire universel, tant sont exclus nombres
dEtats et de peuples de la définition de son
architecture et de ses finalités et du partage de
ses richesses. Je propose donc dutiliser en les
opposant les concepts de mondialisation / et
duniversel (cf déclaration universelle des
droits de lhomme).
7D. 4 grandes définitions de la mondialisation
par les géographes
- Dans les années 1980, le géographe Olivier
Dollfus (1931/2005) auteur de la GU définit
la mondialisation come lensemble des processus
aboutissant à la construction dun nouvel objet
géographique, le système-Monde , terme inventé
en 1984 mais diffusé entre 1994 et 1997. - Dans les années 2000, le géographe Jacques Levy
définit la mondialisation comme lémergence du
Monde comme espace , processus par lequel
létendue planétaire devient un espace . Il
identifie 6 périodes historiques dans la
mondialisation et insiste sur un enjeu général
lémergence dune société complète de niveau
mondial, dune société-Monde. - Dans son dictionnaire de 2003 (Lacoste, 2003)
Yves Lacoste définie la mondialisation comme
lensemble des processus relationnels qui se
développent au plan mondial par lexpansion du
système capitaliste depuis les dernières
décennies du XX em siècle . On remarquera que
son approche géopolitique, contrairement à celle
dOlivier Dollfus, nhésite pas à qualifier le
processus de mondialisation dexpansion dun
système socio-économique dominant, le
capitalisme, rejoignant ainsi les débat déjà
posés au sein de GEMDEV entre Olivier Dollfus et
Michel Beaud. - Si Yves Lacoste réinscrit cette mondialisation
dans lévolution des rapports de force
internationaux, il se demande si la
mondialisation est aussi une façon occidentale de
se représenter le monde .
8E. La mondialisation un système géoéconomique,
géopolitique et géostratégique
- Postulat la mondialisation, cest dabord du
territoire non seulement il ny a aucune
réduction des différenciations et singularités du
monde, mais la logique même de la mondialisation
est dêtre à la fois une valorisation
différenciée des singularités du monde et elle
même productrice de nouvelles singularités. - A la suite de Fernand Braudel et autres auteurs,
la mondialisation un processus géohistorique
multiséculaire dextension progressive de
léconomie libérale marchande et capitalisme à
lensemble de lespace planétaire. - On peut en identifier trois grands stades
géohistoriques les Grandes découvertes de la
Renaisance et du capitalisme marchand, la
colonisation des ¾ de la planète issue de la
Révolution industrielle et de la transition
démographique du XIX em siècle qui sachève en
1950/1960, la mondialisation libérale, financière
et dérégulée qui commence dans les années 1960 et
qui fait passer dun système international à un
système mondial de plus en plus intégré. On passe
déconomies-monde à une économie monde quasi
complète depuis la chute de lURSS et du bloc
soviétique en 1989/1991.
9- La mondialisation oblige à sinterroger sur la
nature de lordre mondial dans la mesure où elle
repose sur un système géopolitique et
géostratégique spécifique à travers des
structures très hiérarchisées entre un centre
hégémonique dominant qui fonctionne comme un
centre dimpulsion et de commandement, des
périphéries intégrées et des périphéries
délaissées. - Cest un système instable et conflictuel pour
lhégémonie alternant phases de stabilités, de
tensions et daffrontements (cf deux Guerres
mondiales et Guerre froide) et dont la régulation
est lobjet de grands débats. - Le nouvel ordre mondial un espace mondialisé
- 1er doit réfléchir au concept de puissance
quid de la puissance aujourd'hui ? Aux systèmes
impériaux francais, anglais ou russe répond un
système US réticulaire souple. A la puissance
démographique ou territoriale répond
l'innovation, la maîtrise de la connaissance, la
circulation, le contrôle des médias Rôle de
l'informationnelle. - 2em processus historique de la montée en
puissance américaine et de son hégémonie ? Le
nouvel ordre mondial doit-il, peut -il être
américain ? Atouts et handicaps, facteurs de
résistance Pb unilatéralisme/ multilatéralisme
par ex. Pb rejet de l'hyperpuissance ? - 3em mode d'articulation entre grandes, moyennes
et petites puissances monde unipolaire ou
multipolaire. Dans l'avenir immédiat montée de
la Chine enjeu central des 50 prochaines années,
statut / pb construction européenne, statut Japon
et Russie, Puissances régionales du sud. - 4em Le Nv Ordre américain peut il construire un
seul espace mondialisé ? - Il ny a aucune fatalité à la marginalité
chaque Etat dispose de marges de manœuvre et
dautonomie mais pose la question du projet
national et étatique (cf Japon Meiji ou
éclatement actuel des Suds).
10F. La mondialisation un dispositif systémique
duel, polarisé et hiérarchisé
- Lintégration à la mondialisation est un
processus producteur de profondes inégalités à
partir dune double logique dintégration/fragment
ation et de marginalisation/exclusion.
Linégalité et le dualisme sont consubstanciels
au mode de développement et à la valorisation
différenciée des territoires - La Triade rassemble les Etats dominants
(Etats-Unis, Canada, Europe occidentale, Japon)
qui contrôlent l'essentiel du pouvoir politique
et économique du monde, possèdent les capitaux et
maîtrisent les technologies et l'information. 20
de la population dispose de 80 du PNB, 70
de lindustrie, 85 de la Recherche
développement, 80 des services de transports et
du stock dIDE. - Les périphéries intégrées fournissent soit des
- matières premières agricoles, minières et
énergétiques, - soit une main d'œuvre à bon marché pour des
productions industrielles (textile, électronique
grand public) réexportées dans le cadre d'une
division internationale du travail. - Seuls les Dragons et certains pays émergents
d'Asie ont pu acquérir une certaine autonomie
grâce à des stratégies étatiques de développement
volontaristes. - Le Brésil, l'Inde, la Chine, l'Afrique du Sud et
la Russie sont les seules puissances régionales
suffisamment fortes pour rechercher un
développement plus autocentré. - Etats intégrés autonomes (Dragons asiatiques,
Chine), - Etats déconnectés (Russie, Inde) en voie de
reconnexion - Les marges évitées rassemblent soit les pays
n'ayant rien à offrir aux pays développés, soit
les Etats mis au ban des nations pour des raisons
politiques (Irak, Libye, Cuba, Iran, Birmanie),
soit des pays ravagés par l'instabilité politique
et les guerres civiles. La grande nouveauté
stratégique est constituée par les attentas du 11
septembre 2001 ces marges peuvent devenir si
dangereuses par leur total abandon que leur
instabilité constitue une menace nouvelle
(Afghanistan, Asie centrale, écharpe
septentrionale de lAfrique sub-saharienne). On
assiste à un processus de réinvestissement
stratégique. - La mondialisation doit être analysée dans ces
composantes et ses dynamiques à travers un
emboitement systématique des échelles
géographiques.
11II. Pour une approche géohistorique et
géopolitique de la mondialisation
12- La 1ere mondialisation
- La mise en connexion
- et la domination du monde par lOccident
- images 8 à 18
13 B. La seconde mondialisation le temps des
nouveaux Empires
14Les actifs, héritage dune certaine mise en
valeur du monde
- Rôle fondamental des 1ere et 2eme Révolutions
industrielles la question du développement
toujours aussi centrale aujourdhui - La révolution scientifique et technique un
levier essentiel - La question énergétique les cycles du charbon
et du pétrole - La révolution sanitaire les Européens à la
conquête du monde et louverture du centre du
continent africain - Aires linguistiques, culturelles et religieuses
- Tracé des frontières, fabrication des Etats dans
les Nouveaux Mondes - Les Trois Suds une résistance asiatique
spécifique, un très ancien Monde, les Amériques
les Nouveaux Mondes, lAfrique, la petite
dernière victime du Grand Partage - Limpérialisme et la marche à la guerre les
nouveaux partages en débats - Images 19 à 28
-
15.
- C. La troisième mondialisation
16Un cadre historique nouveau lapparition dun
anti-modèle
- 1917 une lueur se lève à lEst la recherche
dun anti-modèle spécifique - De la Russie à lURSS, un retrait autarcique
- 1938/1945 guerre impérialiste et guerre de
civilisation - 1945 La Guerre froide gel partiel, compromis
sociaux et économiques, affrontement - 1989/1991 La divine surprise et la nouvelle
mondialisation libérale - Images 29 à 32
17La crise de lImpérium américain ou
limpuissance de la puissance
- Les facteurs de la puissance en mutation du
quantitatif ou qualitatif - Larticulation entre géoéconomie et géopolitique
- Un Empire sans Empire ?
- La Guerre en Irak un retournement ?
- Les nouveaux Croisés désuniversalisent des
valeurs pourtant largement acquises - Le Choc des Civilisations une nouvelle
représentation géopolitique catastrophique - Images 33 à 39 , 41 et 42
18Un monde à la recherche de nouveaux équilibres
- La nouvelle gestion des tensions et conflits
internationaux la multiplication des instances
internationales, du renouveau potentiel du
système onusien aux ambiguités de lOMC, du FMI
et de la Banque Mondiale - Un monde uni ou multipolaire les résistances
française, allemande, russe et chinoise aux
prétentions américaines - Laffirmation de puissances régionales
émergentes dans les grands pays du Sud - La création dun droit international avec la
constitution de la Cour Pénale Internationale
refusée par les Etats-Unis - De nouveaux acteurs internationaux, les ONG
vers lémergence progressive dune opinion
publique mondiale ? - Images 43 à 48
19Un monde de plus en plus inégal une triple
instabilité démographique, géostratégique et
géoéconomiqueImages 49 à 63
20Le piège des Mots
- 1968 Marshall McLuhan (1911/ 1980) publie War
and Peace in the Global Village, qui est traduit
en français et publié deux ans plus tard en
France sous le titre de Guerre et paix dans le
village planétaire. - 1983 léconomiste américain Théodore Lewitt
publie dans la Harvard Business Review un article
intitulé The Globalization of Markets. Cest
luniversalisation rêvée, sinon fantasmée, dun
modèle de consommation et de production
nord-américain. - 1985 léconomiste Kenichi Ohmae va publier
Triad Power, the Coming Shape of Global
Competition, traduit en français par le titre La
Triade, émergence dune stratégie mondiale de la
puissance. Puis The Bordless World, Power and
Strategy in the Interlinked Economy, ou
lentreprise sans frontière en 1990, la fin de
lEtat-nation, lEconomie globale De
lEtat-nation aux Etats-régions publié en France
par Dunod en 1996 - Le terme de globalisation est la traduction
directe et immédiate en français du mot anglais
globalization. Comme le souligne le Harraps, en
anglais ladjectif global peut se traduire soit
par mondial, soit par planétaire ce qui pour un
français ne ressort pas du même champ sémantique
- et la traduction directe de globalization est
le terme français de mondialisation, ce dernier
nétant pas reconnu en retour en anglais.
21La nécessaire redéfinition du terme globalisation
- Le terme de global renvoie au globe, cest à dire
à notre planète et à son fonctionnement au sein
du système solaire fonctionnant comme un tout en
interactions permanentes et complexes. On peut
donc sans problème particulier réinvestir en le
redéfinissant le mot globalisation en le
réarticulant avec les termes de global et de
changement global (cf global change en anglais). - Dans le dernier numéro dHistoriens et
Géographes, on peut redéfinir la globalisation
comme létude et lanalyse de phénomènes
affectant le fonctionnement de lespace terrestre
le globe - dans une interrelation et une
interaction entre le milieu et les sociétés
humaines . - la profonde refondation effectuée dans les années
1990 sur les thématiques géo-environnementales et
les risques savère dautant plus fructueuse
quelle permet aujourdhui de réacticuler dune
manière opératoire mondialisation et
globalisation en réflechissant au mode de
développement adopté, très prédateur globalement. - Pour JP. Vigneau et Y. Veyret, le global revêt
plusieurs acceptions selon lobjet, les outils et
les démarches choisies, le global-planétaire
renvoyant aux débats sur les hiérarchies des
échelles spatiales, le global-systémique
renvoyant aux questions méthodologiques. Mais
il convient de rappeler que la globalité des
modèles est une globalité reconstituée, quelle
néglige ou subordonne certaines entrées du
système, quelle préjuge souvent le sens des
multiples rétroactions . Nous sommes en fait
face à une véritable boîte noire scientifique.
22La globalisation une approche scientifique
encore dans les limbes
- 1- La prise en compte de la complexité des
interactions et la multitude des facteurs à
intégrer savèrent des plus difficiles, ce qui
explique que la définition dun global systémique
scientifiquement solide et opérationnel soit une
reconstruction fragile qui demande une grande
prudence méthodologique et scientifique - dans
létat actuel des connaissances scientifiques
disponibles - dont ne sembarrassent souvent ni
les médias, ni les responsables politiques. - 2 - La nécessaire hiérarchie des études spatiales
et larticulation des échelles en particulier
dans la prise en compte des réponses régionales à
apporter aux défis posés savèrent tout aussi
complexes face à la généralisation outrancière
dont sont lobjet des processus comme la
déforestation, la désertification ou lérosion
des sols.
23.
- 3- et cest là un des apports considérable de
Paul Arnould, lanalyse, la présentation et la
discussion de ces nouveaux enjeux de la
globalisation sopèrent dans le cadre de
représentation géopolitique mobilisant un mode
catastrophiste qui occulte les véritables enjeux
( Biogéographie et changement global la valse
des biomes , Historiens et Géographes, n 395,
p. 91 et 92), en particulier par rapport aux
principales articulations entre globalisation et
mondialisation (types et natures des mise en
valeur, épuisement possible et modes de gestion
des ressources renouvelables et non renouvelables
comme leau, les richesses halieutiques, les
énergies, lépuisement des fronts pionniers et de
la valorisation des terres vierges ). - 4 - dans ce cadre, on doit souligner limportance
accordée par tous ces géographes aux articulation
entre temps et espaces, et aux territoires,
pouvant être entendu comme loccupation,
lappropriation et la valorisation dune portion
despace particulière par un Etat, une société,
un groupe humain dans des rapports géopolitiques,
géoéconomiques et culturels/ religieux complexes
à lespace considéré. - 5 - bien insister sur une grande question de
géopolitique l ingérence écologique dans
les rapports Nord/Sud