Title: L
1LÉcole, ses finalités, ses évolutions, son
fonctionnement
Philippe MeirieuIUFM de lAcadémie de Lyon
2- Faire la classe suppose que lon entre dans
un espace structuré dont les principes de
fonctionnement sont définis, acceptés et mis en
œuvre - Il fut, peut-être, possible, jadis, de faire la
classe sans avoir, chaque jour, à refaire
l Ecole - Le déclin des institutions (Cf. François
Dubet) impose aujourdhui, bien souvent, de
(re)faire l Ecole pour pouvoir faire la
classe au risque, sinon, dexclure ceux et
celles qui nont pas intégré les codes culturels
de l institution scolaire.
3Première partie
- QUELQUES PRINCIPES FONDATEURS DE LINSTITUTION
SCOLAIRE
4Principe n1 LÉcole nest pas seulement un
service, cest aussi une institution.
La qualité dun service se mesure à la
satisfaction des usagers.
La qualité dune institution se mesure à sa
capacité à faire vivre des valeurs.
Un service est fondé sur la juxtaposition (ou la
concurrence) des intérêts individuels .
Une institution est fondée sur la définition
possible et la mise en œuvre dun bien commun.
5Principe n2 La spécificité de la transmission
scolaire est de seffectuer de manière
obligatoire, progressive et exhaustive.
Passer de savoirs fragmentaires, dispersés,
répartis inégalement dans lespace géographique
et le champ social.
à des savoirs que peuvent sapproprier tous les
individus de manière démocratique .
6Principe n3 Dès lors quelle est portée par
un objectif duniversalité, lÉcole se définit
non comme un espace privé, mais comme un espace
public. En tant quespace public, lÉcole nest
pas compatible avec la recherche dune quelconque
homogénéité, que celle-ci soit idéologique,
sociologique, psychologique ou intellectuelle.
7Un espace public...
- nest pas fondée sur les affinités
communautaires...
- mais sur la possibilité dun vivre ensemble.
mais leur permet de les réinscrire dans la
perspective dune réciprocité et dune
universalité possible.
nimpose pas aux individus de renoncer à leurs
convictions personnelles...
8Principe n4 Pour faire exister un espace
public dévolu à la transmission des
connaissances, lÉcole doit suspendre la violence
et la séduction pour placer lexigence de
justesse, de précision et de vérité au cœur de
son fonctionnement.
9Principe n5 Pour faire exister un espace
public dévolu à la transmission des
connaissances, lÉcole doit suspendre les
contraintes de la production et considérer quil
est toujours plus important de comprendre que
de réussir . Ainsi, lÉcole est un lieu où
lon doit pouvoir se tromper sans risque.
10 Réussir et comprendre
- Réussir, cest chercher à résoudre un problème à
léconomie, en faisant appel à des compétences
préexistantes ou à des personnes déjà compétentes.
- Comprendre, cest prendre le temps d ouvrir la
boite noire, de repérer les obstacles et
dintégrer les mécanismes. Comprendre, cest
apprendre pour transférer.
11Principe n6 LÉcole doit être à elle-même son
propre recours.
LEcole - à chaque niveau - doit proposer un
recours possible en cas dobstacle ou de
difficulté - en matière dapprentissage, - en
matière daide méthodologique, - en matière de
ressources culturelles, - en matière
dorientation.
12Principe n7 Laïque, lÉcole contribue à
délivrer ceux qui la fréquentent de toutes les
formes demprise sur les esprits.
La lutte contre toute les formes demprise dans
lécole - y compris lemprise de lécole
elle-même - est une définition possible du
principe de laïcité pour aujourdhui.
13Pour incarner aujourdhui le principe de laïcité
et contribuer à la formation de la citoyenneté,
lEcole doit inscrire au cœur de ses pratiques
- La recherche documentaire,
- La démarche expérimentale,
- La possibilité daccéder à la création
14 Deuxième partie
QUELQUES TENSIONS FONDATRICES POUR LEXERCIDE DU
METIER
15Tension n1 Entre éducabilité et liberté, entre
toute-puissance de ladulte et impuissance du
maître, créer obstinément les meilleures
conditions possibles pour que lélève mobilise sa
liberté dapprendre.
16Pour une pédagogie des conditions...
- Mettre en place tout ce qui est possible pour
enrichir lenvironnement, stimuler le désir
dapprendre et favoriser lassimilation.
- Reconnaître son impouvoir sur la liberté de
lautre, seul moyen de lui permettre de se
mobiliser lui-même dans ses apprentissages.
17Tension n2 Entre transmission dun savoir figé
et libre découverte de ses propres connaissances,
entre obligation dapprendre et respect de
lintérêt de lélève, faire émerger les questions
et retrouver la genèse des connaissances
humaines.
18Tension n3 Entre formalisation encyclopédique
et soumission au désir dapprendre, entre primat
du programme et primat du projet, proposer des
situations-problèmes diversifiées.
19Une pédagogie des situations-problèmes...
- définit des objectifs à atteindre,
- repère des tâches susceptibles de permettre de
rencontrer des objectifs-obstacles, - suggère des stratégies,
- met à disposition des ressources...
- crée des conditions permettant au sujet de
prendre le risque de faire quelque chose quon
ne sait pas faire pour apprendre à le faire.
20Tension n4 Entre appui sur ce que lélève sait
faire et rupture avec le donné, entre utilisation
du déjà-là et découverte dautres univers,
ménager des ouvertures et élargir le champ des
possibles.
21Tension n5 Entre obéissance à un ordre figé et
pratique de la démocratie à lÉcole, entre
respect scrupuleux de lordre scolaire et
autogestion pédagogique, former progressivement
et systématiquement à la conscience citoyenne.
22Former des citoyens...
- Cest mettre en place des situations où puisse
seffectuer, dans des domaines précis et adaptés,
lexpérience que lobéissance à la loi quon
sest soi-même prescrite est liberté (Rousseau).
- Ce nest
- - ni supposer cette formation déjà faite (au
risque de générer des retours en arrière), - - ni supposer que cette formation seffectuera
miraculeusement.
23Tension n 6 Entre cadre contraignant et
développement de lautonomie, entre
accompagnement rigoureux et émancipation
nécessaire, articuler, sur chaque objectif,
étayage et désétayage.
24Tension n7 Entre la solitude devant les élèves
et la participation au projet détablissement,
entre le face à face avec la classe et le travail
déquipe, inventer des formes individuelles
dintelligence collective.
25Troisième partie
- QUELQUES REPERES POUR GERER LA CLASSE AU
QUOTIDIEN
26Repère n1 Afin de permettre à chacun
dapprendre, la classe est organisée comme un
espace hors menace .
On ne peut apprendre que si sont suspendues -
les menaces de lhumiliation, - les menaces de
lidentification de la personne et de ses
actes. - les menaces de laspiration par la
production.
27Repère n2 Dans la classe, les temps et les
lieux sont spécifiés et correspondent, à la fois,
à des activités à mettre en œuvre et à des
comportements attendus clairement identifiés.
Pour cela, lorganisation des temps et des lieux
fait lobjet de rituels qui permettent de faire
émerger les postures mentales exigées des élèves.
28Repère n3 Le travail, dans la classe,
seffectue sur des objets. Un objet est objet
de savoir dans la mesure où il résiste à la
toute-puissance de limaginaire, se constitue
comme une réalité extérieure au sujet et lui
permet de sexprimer à son propos .
29Repère n4 La présence et larbitrage des
objets permettent de dépsychologiser la relation
pédagogique ils lestent les conflits dopinions
et confèrent à la parole du maître sa véritable
autorité. La classe est un lieu où la vérité
dune parole nest pas relative au statut de
celui qui lénonce.
30Repère n5 La tâche à réaliser permet de mettre
lélève en projet. Elle doit être comprise et
utilisée en tant que telle. La tâche nest pas,
en elle-même, lobjectif à atteindre. Cest
lobjectif qui doit être évalué à travers la
tâche. Le réinvestissement dans une nouvelle
tâche permet, à la fois, de mobiliser lélève et
de vérifier une acquisition.
31Repère n6 La classe, dans lensemble de ses
activités, est apprentissage de la démocratie.
Elle doit permettre, aux élèves dapprendre à se
construire comme un collectif, didentifier les
objets sur lesquels ils peuvent légiférer
légitimement, de définir les règles incarnant le
bien commun et de les appliquer dans la durée.
32Repère n7 Les sanctions contribuent non à
exclure de la classe mais à y intégrer elles
reconnaissent à lélève la responsabilité de ses
actes et, en même temps, lui permettent de
revenir dans le collectif dont il sest lui-même
exclu.
33Conclusion provisoire...
- La réflexion pédagogique est plus que jamais
dactualité - Plus que jamais le choix est entre la pédagogie
et lexclusion.