Title: L
1Lhistorien et les mémoires de- la Seconde
Guerre mondiale- la guerre dAlgérie(Terminales
L/ES)Pistes de réflexion et documents
- Groupe de travail Lycée, 2012-2013
- Cécile Vast
- Jean-Pierre Costille
2Extrait du Bulletin officiel spécial n8 du
13 octobre 2011
Le rapport des sociétés à leur passé
réflexion sur le contexte, et les conditions
(apaisées et/ou conflictuelles) dans lesquelles
les différentes sociétés envisagent et
construisent leur rapport au passé, en termes
didentité, de références culturelles et
patrimoniales, dusages politiques et mémoriels.
3 Les mémoires lecture historique suppose
dintroduire dans la problématique de la séquence
une réflexion sur la distinction mémoire /
histoire (objectifs différents de fidélité /
vérité). Envisager les mémoires comme objet
détude pour lhistorien (cf. Pierre Nora, entre
autres)
4 Lhistorien et les mémoires mener une
réflexion sur
- diversité des mémoires sociales dun événement
et de leurs formes dexpression jusquà nos
jours. Utilisation du pluriel ( mémoires
sociales, pluralité des expériences) préférée au
singulier ( mémoire collective , notion floue)
Une étude au choix choix entre deux
périodes historiques, la Seconde Guerre mondiale
(1939-1945) ou la guerre dAlgérie (1954-1962).
? deux objets de nature différente, mémoire
(fidélité) / histoire (vérité)
? rôle et place du discours de lhistorien face
aux usages sociaux, politiques et mémoriels du
passé, historiographie
? lhistorien et les témoins
? les mémoires, objet dhistoire
5Quelques pièges et impasses à éviter
? Présenter lhistorien comme lantithèse de
lacteur-témoin sil tente dhistoriciser et de
donner de lintelligibilité au rapport des
Français à leur passé, il peut aussi avoir des
liens personnels avec ce passé (Daniel Cordier,
Mohammed Harbi, par exemple).
? Plaquer artificiellement un mode de
fonctionnement mécanique des mémoires une
période de silence (voire volonté détouffer)
qui serait suivie dun réveil des mémoires
des travaux récents (François Azouvi sur le
génocide des juifs, Pierre Laborie sur la mémoire
de lOccupation et de la Résistance, Thomas
Fontaine sur lhistoire de la déportation)
montrent une réalité des expressions mémorielles
bien plus complexe.
? Laisser penser que lentrée dans lhistoire et
lhistoricisation ne peuvent se faire que grâce
aux travaux dhistoriens étrangers (anglo-saxons,
notamment)
6Lhistorien et les mémoires de la Seconde Guerre
mondiale
7Indications bibliographiques
- La question du rapport de la société française au
souvenir de lOccupation et de Vichy nest pas
neuve, elle est rapidement investie et fait
lobjet décrits dès la Libération. Des essais
venus dhorizons différents installent un certain
discours sur le rapport des Français à leur passé
proche (culpabilité, mauvaise conscience,
ingratitude, difficulté à assumer le passé,
etc.). Deux exemples, parmi dautres
1) Du côté des résistants, lélitisme, lamertume
et le désenchantement inspirent lidée dune
nation oublieuse et ingrate ? Jean Cassou, La
mémoire courte, Éditions de Minuit, 1953 (réédité
aux Mille et une Nuits, 2001) ? Henri Michel,
Quatre années dures, Grasset, 1945 (un
roman-témoignage écrit par lhistorien de la
Seconde Guerre mondiale)
2) La littérature des hussards (Roger Nimier,
Antoine Blondin, Jacques Laurent, Marcel Aymé)
participe également à diffuser et populariser une
certaine représentation (mauvaise conscience,
veulerie, résistantialisme ) ? Marcel Aymé,
Uranus, Gallimard, 1948 ? Roger Nimier, Les
épées, Gallimard, 1948
8Indications bibliographiques
- Stanley Hoffman, Essais sur la France. Déclin ou
renouveau ?, Seuil, 1974 - Lhistorien américain revient sur son enfance
dans la France occupée et nuance limage de
lattitude des Français proposée par le film Le
chagrin et la pitié.
- Henry Rousso, Le syndrome de Vichy de 1944 à nos
jours, Seuil, 1987 - Dans cet ouvrage pionnier, Henry Rousso revient
sur le caractère obsessionnel du souvenir de
Vichy depuis la Libération, et avance quelques
interprétations sur le rapport des Français à
Vichy. La plus connue est celle du
résistancialisme ou du mythe
résistancialiste les Français se seraient
pensés résistants pour couvrir leur mauvaise
conscience.
- Annette Wieviorka, Déportation et génocide.
Entre la mémoire et loubli, Plon, 1992 - Une interprétation de la place respective et
successive des mémoires des différentes formes de
déportations (persécution et répression). Pour A.
Wieviorka, au souvenir dominant de la déportation
de répression, symbolisée par Buchenwald, succède
à partir des années 1980 celui du génocide,
symbolisé par Auschwitz.
- Robert Frank, La mémoire empoisonnée in
AZÉMA (Jean-Pierre) et BÉDARIDA (François)
dir., La France des années noires, Seuil, 1993 - Article fondamental pour le sujet, qui reprend
des articles antérieurs publiés depuis 1980 il
aborde la pluralité des mémoires de la Seconde
Guerre mondiale, les acteurs et les vecteurs, le
rôle des historiens, une chronologie fine et
nuancée.
9Indications bibliographiques
- Éric Conan et Henry Rousso, Vichy, un passé qui
ne passe pas, Fayard, 1994 - Le livre reprend les développements du Syndrome
de Vichy et revient sur lépisode Mitterrand,
notamment. Lexpression est passée à la postérité
!
- Pierre Laborie, Historiens sous haute
surveillance in Esprit, janvier 1994 - Une réflexion sur les rapports entre historiens
et témoins, sur les difficultés à écrire une
histoire sous le regard pressant des témoins.
- Jean-Marie Guillon, La Résistance, cinquante
ans et deux mille titres après in GUILLON
(Jean-Marie) et LABORIE (Pierre), Mémoire et
Histoire la Résistance, Toulouse, Privat, 1995 - Un article, réduit ici aux mémoires de la
Résistance et à son historiographie, en relation
avec dautres événements marquants de la SGM
(Vichy, génocide, Occupation, etc.)
- Antoine Prost, Douze leçons sur lhistoire,
Seuil, 1996 - Antoine Prost consacre de nombreux chapitres au
rôle social de lhistorien, à la place de son
discours confronté à dautres usages du passé.
10Indications bibliographiques
- Cahier spécial du journal Libération à propos de
la table ronde organisée en mai 1997 à la demande
des époux Aubrac - http//www.liberation.fr/cahier-special/0101220489
-special-aubrac-raymond-aubrac-et-si-les-historien
s-nous-posaient-des-questions-samedi-17-mai-1997-a
-liberation-lucie-et-raymond-aubrac-se-sont-confro
ntes-aux-questions-de-huit-historiens-a-propos-de-
l - Ensemble des discussions et des réactions
historiens de la Résistance (Jean-Pierre Azéma,
François Bédarida, Laurent Douzou, Henry Rousso,
Maurice Agulhon) et témoins (Lucie Aubrac,
Raymond Aubrac, Daniel Cordier, Jean-Pierre
Vernant).
- Paul Ricœur, La mémoire, lhistoire, loubli,
Seuil, 2000 - Ouvrage -difficile- dun philosophe de la
phénoménologie qui apporte une réflexion
essentielle sur les rapports entre lhistoire et
la mémoire. Paul Ricœur sappuie sur de nombreux
exemples empruntés à lhistoire de la Seconde
Guerre mondiale, et commente les ouvrages des
historiens cités précédemment.
- Pierre Laborie, Les Français des années
troubles, Seuil, 2003 - Un recueil darticles précédé dun long
avant-propos essentiel Pierre Laborie revient
sur le rôle social de lhistorien, les
difficultés et les spécificités de lhistoire du
très contemporain confronté à dautres
discours et dautres usages du passé.
- Pieter Lagrou, Mémoires patriotiques et
occupation nazie, Bruxelles, Complexe, 2003 - Une comparaison européenne des mémoires de la
Seconde Guerre mondiale par un historien belge.
11Indications bibliographiques
- Laurent Douzou, La Résistance française une
histoire périlleuse, Seuil, 2005 - Un essai dhistoriographie sur lécriture de
lhistoire de la Résistance place et rôle des
acteurs-témoins, rôle central du Comité
dhistoire de la Seconde Guerre mondiale,
renouvellement des questionnements historiques,
place de lhistoire de la Résistance aujourdhui.
- François Marcot dir., Dictionnaire historique
de la Résistance, Robert Laffont, 2006 - De très nombreux articles abordent la question
des mémoires de la Résistance.
- Pierre Laborie, Acteurs et historiens dans
lécriture de lhistoire de la Résistance in
DOUZOU (Laurent) dir., Faire lhistoire de la
Résistance, Presses universitaires de Rennes,
2010 - Des rappels épistémologiques très utiles sur les
intentions divergentes des historiens et des
acteurs dans lécriture de lhistoire.
- Olivier Wieviorka, La mémoire désunie. Le
souvenir politique des années sombres de la
Libération à nos jours, Seuil, 2010 - Une mise en perspective des politiques publiques
de la mémoire, vue den haut (pouvoirs
publics, acteurs politiques et associatifs), sans
vraiment aborder la question des mémoires
sociales.
12Indications bibliographiques
- Guerre mondiale, guerre totale,
Gallimard-Mémorial de Caen, 2010 - Catalogue de la nouvelle exposition permanente du
Mémorial de Caen avec des textes rédigés par
Denis Peschanski, Pierre Laborie et Jean
Quellien. Un chapitre sur Mémoires et
histoire
- Pierre Laborie, Le chagrin et le venin. La
France sous lOccupation, mémoire et idées
reçues, Bayard, 2011 - La première partie du titre est une référence
évidente au film de Marcel Ophuls Le chagrin et
la pitié. Avec les travaux dHenry Rousso et de
Robert Frank, cest sans doute louvrage à lire
pour aborder le sujet généalogie de la
vulgate sur lattitude des Français sous
lOccupation, impact, réception et usages du film
Le chagrin et la pitié, regard critique sur les
manuels scolaires, rôle des médias, place des
historiens, retour et analyse de la table-ronde
de Libération et de ses enjeux
- Michèle Zancarini-Fournel et Christian
Delacroix, La France du temps présent, 1945-2005,
Belin (Histoire de France), 2010 - Quelques exemples et quelques documents sur les
questions mémorielles autour de la Seconde Guerre
mondiale et des conflits coloniaux.
- François Azouvi, Le mythe du grand silence.
Auschwitz, les Français, la mémoire, Fayard, 2012 - Dans ce livre étayé, François Azouvi discute et
critique lidée dun long silence sur le génocide
des juifs dans la société française après 1945.
Il montre, au contraire, une prise de conscience
précoce et qui sélargit à la société par cercles
concentriques.
13SCÉNARIO N1
- I - Histoire et mémoire des fonctions et des
objectifs différents - Les mémoires
- ? Elles se placent du côté de la fidélité, de
laffirmation identitaire, souvent liées aux
événements traumatiques, elles expriment une
singularité - 2) Lhistoire
- Une démarche dinterprétation, dexplication, de
compréhension et dintelligibilité, lhistoire se
donne pour objectif la recherche dune vérité,
elle vise aussi à se libérer du passé (Lucien
Febvre Lhistoire est un moyen dorganiser le
passé pour lempêcher de trop peser sur les
épaules des hommes ), universalité
- II - Un événement, plusieurs mémoires
- ? Pluralité des mémoires et des expériences de la
SGM (génocide, Vichy, occupation, résistance,
prisonniers, soldats de 1940, etc.) - Diversité des acteurs, des vecteurs, des
expressions - Diversité et périodisation des usages et
discours sur le passé (voir article de R. Frank)
- III - Lhistorien face aux discours mémoriels et
aux usages du passé - Histoire est une construction et une
interprétation - Historiographie et débats historiographiques
(plusieurs interprétations, exemple de
Rousso-Laborie) - Rôle social de lhistorien, etc.
14SCÉNARIO N2
- I - Sujet détude Les comportements des
Français sous lOccupation, mémoires et histoire - Objectif montrer lécart entre les discours
mémoriels, souvent réducteurs , reconstruits,
singuliers, fractionnés, et les résultats du
travail de lhistorien - Partir dun jugement récurrent, dune idée reçue,
dune vulgate ressassée sur les comportements
des Français sous lOccupation - Analyse de lentretien donné par Daniel Cordier à
Libération le 11 avril 2012 à la suite du décès
de Raymond Aubrac (voir diapo suivante) - Qui parle ? (un témoin) Doù parle-t-il et qui
est-il ? (fidélité à Jean Moulin, ancien
résistant) Quelle mémoire de la SGM exprime-t-il
? (celle de la Résistance) Quelle est son
interprétation de lhistoire ? Quel jugement
porte-t-il (caractère minoritaire de la
Résistance appuie lidée dune majorité de
Français attentistes ) - Entreprendre un travail de déconstruction -
décryptage de ce discours, apporter un éclairage
historique, montrer lécart entre ce que nous
apprend le travail de lhistorien et le discours
mémoriel, les jugements rétrospectifs - Confronter cet entretien avec un texte
dhistorien sur la réalité et la complexité des
comportements.
II - Mise en perspective lhistorien et les
mémoires de la SGM ? Reprise du plan en 3 parties
vu précédemment 1) Mémoires et histoire - 2) Un
événement, plusieurs mémoires - 3) Le rôle de
lhistorien ? Introduire dautres documents,
dautres exemples de mémoire (génocide), dautres
supports (extraits de films)
15Entretien de Daniel Cordier dans le journal Libération à la suite du décès de Raymond Aubrac, 11 avril 2012 Très peu de Français ont été courageux. Les Aubrac le furent Les gens naiment pas lHistoire, ils aiment la petite histoire. Les choses à côté. Au jour même de la mort de Raymond Aubrac, les questions autour de son arrestation et de son évasion sont secondaires. On doit garder le souvenir dun homme qui sest admirablement conduit dans une époque où la majorité des Français a trahi la France. Je pense que cest le moment de rappeler comment se sont comportés lensemble des Français. Combien étions-nous à Londres ? La première fois que jai vu le général de Gaulle, le 6 juillet 1940, nous étions tous en civils, à peine 2 500 dont 800 hommes de la Légion étrangère. Voilà exactement ce que représentait alors larmée de De Gaulle, un mois après la signature de larmistice. Tandis que "larmée de lArmistice" de Pétain était constituée de 100 000 hommes. Les Français ont été des lâches et très peu ont été courageux. Les Aubrac le furent. Et je tiens à les saluer aujourdhui.
16Liens entre les programmes de première et de
terminale Vocabulaire ou repères devant être vus
en classe de première On pourrait imaginer de
demander aux élèves de réaliser une fiche sur
certains sujets clairement identifiés et de
lister le vocabulaire à maitriser. Fiche à
distribuer en début dannée, puis à reprendre
ensemble tout au long de l'année de première.
Seconde Guerre mondiale (8 dates), articulation
guerre ou événements de Gaulle, Churchill,
bataille de Stalingrad, Résistance, Jean Moulin,
Pétain.
17Lhistorien et les mémoires de la la guerre
dAlgérie
18Les mémoires de la guerre dAlgérie questions,
problèmes, enjeux
- Il ne sagit évidemment pas de retracer
lhistoire de la guerre dAlgérie, mais le thème
suppose de connaître les grands traits, les
événements et les enjeux de cette période
(1954-1962)
- Des mécanismes et des phénomènes mémoriels
semblables à ceux de la période de la guerre et
de lOccupation (1939-1945) et quelques
particularités
? Points communs
- un événement traumatique conflit armé dune
guerre coloniale, utilisation de la violence
(torture, terrorismes), déracinements
(regroupements, appelés, rapatriés), climat larvé
de guerre civile
- pluralité des mémoires de lévénement, de part
et dautre de la Méditerranée (en France, en
Algérie), mémoires divisées et conflictuelles,
mémoires qui se construisent déjà pendant la
période (1954-1962)
- multiplicité des usages politico-mémoriels, en
France comme en Algérie
19 - rapport à la nation, à la question de
lidentité nationale, aux valeurs républicaines,
à lÉtat de droit
- place, rôle, fonction de lhistorien confronté
à dautres discours sur le passé. Des historiens
parfois acteurs de lhistoire ou personnellement
impliqués
? Spécificités
- présence dune importante communauté de
travailleurs immigrés algériens, puis denfants
français dorigine algérienne
- temporalités croisées et références
récurrentes (y compris pendant la guerre
dAlgérie) à la période de lOccupation,
télescopages usage de la torture, question du
terrorisme, héritage de la Résistance,
réutilisation de mots et de références
symboliques empruntées à la période 1940-1944
(maquis, ALN, FLN, OAS, etc.)
20 Quelles mémoires de la guerre dAlgérie ?
? Lexpression des mémoires (ouverte ou
silencieuse) se cristallise autour de
? Groupes et communautés appelés du contingent,
rapatriés ( pieds-noirs , dont les séfarades),
harkis, Algériens immigrés en France et leurs
enfants, Algériens en Algérie, communistes,
catholiques de gauche, gaullistes, partisans de
lAlgérie française et anciens de lOAS,
messalistes, mémoires officielles (France,
Algérie), etc. Lhistorien Guy Pervillé distingue
trois mémoires celle des partisans de lAlgérie
française, celle des partisans de lindépendance,
celle de ce quil appelle la majorité
silencieuse .
? Faits, événements, thématiques dont le poids et
le sens varient selon les groupes mémoriels
Sétif et Guelma en mai 1945, novembre 1954, la
torture, la bataille dAlger (1957), disparition
de Maurice Audin en juillet 1957 (communistes),
massacre des messalistes à Melouza par le FLN en
mai 1957, mai 1958 et le retour de de Gaulle,
putsch davril 1961, manifestation des Algériens
du 17 octobre 1961, métro Charonne du 8 février
1962, 19 mars 1962 et accords dEvian, abandon
des harkis, rapatriement des Européens en France,
indépendance en juillet 1962, terrorisme de
lOAS, etc.
? Usages politico-mémoriels anti-gaullisme de
lextrême-droite, recomposition politique des
partis de droite et de gauche, géographie
électorale de la France du sud-est, ancrage du
FN, etc.
21Quelle chronologie ? Essai de périodisation
- Difficulté à définir une chronologie limpide
tant les souvenirs sont éclatés.
- Proposition dun découpage en quatre périodes,
qui tente de croiser les contextes français et
algériens
1) De mai 1945 à 1962 (Sétif et Guelma en mai
1945 puis les années 1954-1962) les expériences
de la guerre dAlgérie et la formation dune
génération algérienne (Paul Thibaud, Esprit)
2) De 1962 aux années 1970 sortir de la
guerre, quitter lAlgérie. Période marquée par le
gaullisme politique, les débuts de la V
République et dautres projets pour la France, la
décolonisation, la croissance, la modernisation,
lEurope. La crise didentité est davantage
générationnelle (ainsi que des souffrances
communautaires, des mémoires rentrées appelés,
pieds-noirs, harkis), mais pas de crise
didentité nationale.
3) Des années 1970 à la guerre civile algérienne
(1992) la redécouverte, le choc moral et le
prisme de lOccupation (1940-1944). Dans les
années 1970, entrechoc et entremêlement des
périodes, une prise de conscience face aux dénis,
aux mensonges, aux trahisons de la guerre
dAlgérie (torture, dévoiement de valeurs),
confrontation aux années de guerre. Regard
critique sur la colonisation (succès de Frantz
Fanon, Les damnés de la terre, 1961). Puis les
lois damnistie de 1982 (militants de lOAS)
4) De 1992 à nos jours guerre reconnue,
mémoire introuvable. Lassassinat de Boudiaf en
1992, rôle de la guerre civile en Algérie. Loi de
1999 reconnaissant le terme de guerre ,
journée des harkis en 2001, loi avortée de 2005
sur bienfaits de la colonisation, impossibilité
de trouver une commémoration commune (5 décembre
2002), commémorations relativement discrètes du
19 mars 1962 en 2012.
22Indications bibliographiques
- Au même titre que pour la période de
lOccupation, lexpérience de la guerre dAlgérie
a suscité très tôt des écrits (témoignages,
essais, analyses, pamphlets, etc.)
- Sur la paupérisation de la société algérienne
- Germaine Tillion, LAlgérie en 1957, Éditions de
Minuit, 1957. Étude publiée une première fois par
feuilletons entre 1955 et 1956 dans la revue de
lADIR Voix et Visages. Une dénonciation de la
clochardisation de la population algérienne. - Pierre Bourdieu et Abdelmalek Sayad, Le
déracinement. La crise de lagriculture
traditionnelle en Algérie, Éditions de Minuit,
1964 - Sur la dénonciation de la torture
- Henri Alleg, La question, Éditions de Minuit, 1958
- Jean-Pierre Rioux (dir.), La guerre dAlgérie et
les Français, Fayard, 1989 - On peut trouver dans ce recueil présentant les
actes dun colloque organisé par lIHTP en 1988,
une des toutes premières réflexions sur les
mémoires de la guerre dAlgérie. Il sagit de
larticle de Robert Frank, Les troubles de la
mémoire française , pp. 603-607. Mise en garde
de Robert Frank à propos du souvenir de la guerre
dAlgérie, lamnésie est très partielle et non
durable .
- Benjamin Stora, La gangrène et loubli. La
mémoire de la guerre dAlgérie, La Découverte,
1991
23Indications bibliographiques
- Sylvie Thénault, Une drôle de justice. Les
magistrats dans la guerre dAlgérie, La
découverte, 2001
- Raphaël Branche, La torture et larmée pendant
la guerre dAlgérie, Gallimard, 2001
- Raphaëlle Branche et Sylvie Thénault, La guerre
dAlgérie, La documentation française, 2001
- Guy Pervillé, La guerre dAlgérie. Histoire et
mémoire, CRDP dAquitaine, 2008
- Mohammed Harbi et Benjamin Stora, La guerre
dAlgérie, Pluriel, 2010
- Sur lhistoriographie à la différence de la
Grande Guerre ou de lOccupation, lÉtat na pas
encouragé des travaux historiques sur la guerre
dAlgérie. Lécriture de cette histoire sappuie
sur des vocations individuelles dhistoriens
confrontés à des enjeux mémoriels, des mémoires
antagonistes ou des groupes de pression, voire
directement impliqués. Quelques noms
Charles-André Julien, Charles-Robert Ageron,
Gilbert Meynier, Benjamin Stora, Mohammed Harbi,
Guy Pervillé, Claude Liauzu, Sylvie Thénault,
Raphaëlle Branche, etc.
24Quelques films
- Muriel ou le temps dun retour, film dAlain
Resnais, 1963. - Les parapluies de Cherbourg, film
franco-allemand de Jacques Demy, 1964. Évocation
de la guerre dAlgérie à travers le personnage de
Guy, un jeune mécanicien qui doit partir faire
son service militaire en Algérie. - La Bataille dAlger, film italo-algérien de
Gillo Pontecorvo, 1966. Le film évoque, sous la
forme dune reconstitution, la bataille dAlger
en 1957, avec des acteurs témoins de la guerre
dAlgérie, indépendantistes. Censuré en France
jusquen 2004. - Avoir vingt ans dans les Aurès, film français de
René Vautier, 1972 avec Philippe Léotard. La
guerre dAlgérie vécue par les appelés du
contingent. - Le Coup de sirocco, film français dAlexandre
Arcady, 1979. Film avec Roger Hanin et Patrick
Bruel, il est consacré à lexil, au déracinement
des pieds-noirs. - Lennemi intime, film franco-marocain de Florent
Emilio Siri, 2007 - Hors-la-loi, film franco-algérien de Rachid
Bouchareb, 2010. Le film parle de lengagement
indépendantiste et évoque les massacres de Sétif
et de Guelma, le massacre du 17 octobre 1961.
25Quelques documents
Document n1 La dénonciation de la torture
- François Mauriac, La question , LExpress, 14
janvier 1955 (extraits) - - Vous seul pouvez parler... Vous seul.
- Je détourne la tête. Que de fois l'aurai-je
entendu ce "vous seul"! Mes ennemis croient que
je cède à la passion d'occuper la scène. Je
soupire - - Il faudrait des preuves. On n'a jamais de
preuves. - - Moi, j'ai vu, dit l'homme.
- Je l'observe à la dérobée je connais bien ce
regard celui de mon ami R., celui de ce prêtre
de la Mission de France qui travaille dans la
région de Constantine, le regard de ceux qui ont
vu de leurs yeux, qui ne peuvent plus penser à
rien d'autre toutes les fleurs du monde sont
flétries pour eux. Des obsédés, bien sûr.
Moi-même, je commence à la subir, cette
obsession, mais un écrivain est habile à
s'évader. J'insiste, presque suppliant - - À quoi bon, puisque "ça" ne laisse pas de
traces! - Ils n'ont pas renoncé aux coups de nerf de boeuf,
vous savez! Mais la baignoire, ou plutôt le
baquet d'eau sale où la tête est maintenue
jusqu'à l'étouffement, mais le courant électrique
sous les aisselles et entre les jambes, mais
l'eau souillée introduite par un tuyau dans la
bouche jusqu'à ce que le patient s'évanouisse - Publié dans François Mauriac, Bloc-notes. Tome 1
1952-1957, Seuil (Points-Essais), pp. 237-242
26Document n2 Le déracinement des pieds-noirs à
travers une chanson
Enrico Macias, Non je nai pas oublié (1966),
extrait vidéo https//www.youtube.com/watch?vdpSn
rqJ5ZOc La ville blanche écrasée de soleil Où un
jour, je suis né Les rues en pente le pont sur le
Rhumel Les jardins d'orangers Refrain Non je
n'ai pas oublié Bien que ma vie ait changé Mais
le silence est souvent une façon d'aimer Non,
non, non, Non je n'ai pas oublié Tous ces visages
attristés Mais on n'a pas le droit de
sacrifier Le présent au passé La rue qui chante
l'été venu N'oublie pas l'hiver brutal Et les
blessures que l'on ne voit plus Lui font encore
bien mal Tant d'espérance tout à coup balayée Par
un vent de folie Tant d'innocence tout à coup
étonnée D'implorer le sursis
Refrain Non je n'ai pas oublié Bien que ma vie
ait changé Mais le silence est souvent une façon
d'aimer Non, non, non, Non je n'ai pas
oublié Tous ces visages attristés Mais on n'a pas
le droit de sacrifier Le présent au passé Quand
un orage assombrit le ciel, II faut que tombe la
pluie Avant de retrouver au soleil L'envie
d'aimer la vie Tous ces liens qui ont tressé La
chaîne qui tenait le bateau Tous ces liens qui
ont craqué En laissant sur le quai nos
berceaux Refrain
27Document n3 La mémoire des appelés du
contingent Avoir vingt ans dans les Aurès de René
Vautier, 1972
À propos du film Avoir 20 ans dans les Aurès
http//www.avoir20ansdanslesaures.net/wp/ http//
www.zerodeconduite.net/blog/18947-avoir-vingt-ans-
dans-les-aures.html.UZndP5Xv6aE Un site de
référence sur la guerre d'Algérie
http//education.francetv.fr/frise-chronologique/
frise-de-la-guerre-d-algerie-o25436 Une lecture
complémentaire pour aborder la question des
appelés Raphaëlle Branche, L'embuscade de
Palestro, Armand Colin, 2010 http//clio-cr.clion
autes.org/spip.php?article2866
28Document n4 La loi n 99-882 du 18 octobre
1999 relative à la substitution de l'expression
aux opérations effectuées en Afrique du Nord
à l'expression à la guerre d'Algérie ou aux
combats en Tunisie et au Maroc . Proposition
de loi enregistrée à la Présidence de lAssemblée
nationale le 28 avril 1999 tendant à la
reconnaissance de létat de guerre en Algérie.
Présentée par MM. Georges COLOMBIER, Didier
QUENTIN et François ROCHEBLOINE,
Députés. Mesdames, Messieurs, En adoptant la loi
n 74-1044 du 9 décembre 1974 donnant vocation à
la qualité de combattant aux personnes ayant
participé aux opérations en Afrique du Nord entre
le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962, le
Parlement entendait assurer une complète égalité
des droits entre les militaires engagés dans les
opérations de sauvegarde de lordre en Afrique du
Nord et ceux ayant servi en période de guerre.
Cette loi faisait toutefois mention des
opérations effectuées en Afrique du Nord et non
de la guerre dAlgérie . Depuis, un quart de
siècle sest écoulé sans que les sacrifices
consentis par nos soldats dans ce conflit naient
été pleinement reconnus. Cette situation est
vécue à juste titre par les anciens combattants
comme un reniement de ce quils ont fait par
devoir au service de la Nation. Si la nature
particulière de ce conflit, qui ne ressemblait
pas aux guerres du début et du milieu de ce
siècle, a pu expliquer les réticences à le
qualifier demblée de guerre, les esprits, par
une lente évolution appuyée sur un développement
des travaux historiques, ont progressivement
tendu à considérer que les événements dAfrique
du Nord devaient, par les méthodes de combat
utilisées et les risques encourus par nos
soldats, être assimilés à une guerre et non pas à
de simples opérations de police. Si chacun
saccorde aujourdhui à reconnaître que
lexpression du langage courant guerre
dAlgérie correspond à la réalité historique
vécue par nos concitoyens, il nen demeure pas
moins que seule la loi peut mettre fin à cette
situation. Il convient donc dofficialiser cette
appellation et de faire disparaître lexpression
opérations de maintien de lordre du code des
pensions militaires dinvalidité et du code de la
mutualité pour les combats qui se sont déroulés
sur le territoire algérien entre 1954 et 1962.
Tels sont les motifs pour lesquels il vous est
demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir
adopter la présente proposition de loi.
29Eléments du programme de première nécessaires
pour traiter les documents proposés Voici les
points que doit posséder un élève à l'entrée en
terminale à propos de la Guerre d'Algérie 6
événements, de Gaulle, Ben Bella, FLN, Toussaint
Rouge, Guelma, accords d'Evian, OAS Cela peut
prendre la forme d'une chronologie fabriquée, de
mini-biographies (8 lignes), de lieux,
d'événements