Title: Partie II
1Partie II
- La pensée économique
- à lheure des balbutiements du capitalisme
marchand
2Chapitre premier
- La pensée mercantile
- ou la pensée marchande contre la communauté
3I. Les cadre de la pensée mercantile la pensée
dun nouveau monde féodo-marchand
- Lessor du commerce
- Les marchands et les Princes
- La puissance de lEglise de Rome contestée
4II. La pensée mercantile une pensée du
marchand pour le marchand
- Des réflexions prenant corps sur les pratiques
marchandes et les justifiant - Des réflexions relatives à lintermédiaire de
léchange la monnaie - Le paradoxe de Monsieur de Malestroit
- LES PARADOXES DU SEIGNEUR DE MALESTROICT,
CONSEILLER DU ROY, MAISTRE ORDINAIRE DE SES
COMPTES, SUR LE FAICT DES MONNOYES, PRESENTEZ À
SA MAIESTÉ, AU MOIS DE MARS, M.D.LXVI - Au Roi
- Sire, ayant travaillé trois ans, tant par
commandement de vostre Maiesté, que par
ordonnance de vostre Chambre des Comptes, au
faict des monnoyes, à elle renvoyé pour vous en
donner advis d'autant que la chose qui plus
nous doibt inciter d'y regarder de plus, c'est
l'estrange encherissement que nous voyons pour le
iourd'huy de toutes choses Lequel combien que
chascun, tant grand que petit, le sente à sa
bourse si est-ce que peu de gens peuvent gouster
la source origine de ce mal, lequel fault
necessairement tirer du fons abysme desdictes
monnoyes, icelle demonstrer par raisons
grandement paradoxes, c'est à dire, fort
esloingnees de l'opinion du vulgaire. Il m'a
semblé, Sire, que pour traicter la matiere selon
son naturel, attendant faire paroistre à vostre
Maiesté un plus grand fruict de mon labeur, ie ne
pouvois mieux faire, pour acheminer l'oeuvre, que
de mettre en avant les deux Paradoxes que i'ai
osé presenter à vostre Maiesté, à fin qu'ilz en
soient mieux receus veux par tout qu'estans
bien entendus, chascun congnoisse le tort qu'il
se faict d'encherir, mettre allouer lesdictes
monnoyes par dessus le prix de voz Ordonnances.
Lesquelles par ce moyen seront mieux gardees,
qu'elles n'ont accoustumé dont adviendra à vous
premierement, Sire, puis à voz subiectz, un grand
incroyable profict. - http//www.taieb.net/auteurs/Malestroit/paradoxes.
html
5- Jean Bodin et sa Réponse aux paradoxes de
Monsieur de Malestroit touchant lenchérissement
de toutes choses 1568 - loi de Gresham la mauvaise monnaie chasse la
bonne - b. La fascination pour laccumulation de métal
précieux - c. La constitution dune comptabilité privée et
sa généralisation à la comptabilité publique la
Balance Commerciale - Luca Pacioli (traité de comptabilité Tractatus
XI particularis de computus et scripturis
publié en 1494). - Principe tout mouvement dans la comptabilité
senregistre par une écriture qui porte au débit
dun compte ce quelle porte au crédit dun autre
62. Les applications des théories marchandes à
lEtat Les Etats sont considérés comme des
sangsues les uns pour les autres
- La nécessité pour lEtat de constituer un trésor
- Idée de Colbert de 1664
- Il ny a que labondance dargent dans un Etat
qui fasse la différence de sa grandeur et de sa
puissance - Il ny a quune même quantité dargent qui
roule dans toute lEurope, on ne peut augmenter
largent dans le royaume, quen même temps que
lon en ôte la même quantité à des Etats
voisins .
7- b. Les moyens pour constituer un trésor
- Les pillages
- Les guerres
- Les colonies
- Une balance commerciale excédentaire
8- La balance commerciale théorisée par Thomas Mun
dans Engands Treasure by foreign Trade 1664 le
moyen ordinaire daccroître notre richesse et nos
espèces, cest le commerce extérieur, pour lequel
il nous faut toujours observer cette règle,
vendre plus aux étrangers que nous leur achetons
pour notre consommation
9- c. La nécessité de favoriser les exportations et
de favoriser les marchands nationaux - d. La nécessité de limiter les importations
10Chapitre 2
- La Physiocratie ou la défense de la communauté
agricole contre le capitalisme marchand
11Introduction
- Cadre général la France dAncien Régime
- Lopposition au mercantilisme le
renversement car la chrématistique a dévoré
lagriculture - A lorigine de la pensée physiocratique deux
hommes Quesnay et Mirabeau - Lambition fonder une science nouvelle et
trouver un nouveau mode de légitimation de
lordre dAncien Régime
12I. Les présupposés de la physiocratie
- Il existe des lois naturelles
- Dieu et la Nature
- Les lois naturelles
- Les lois naturelles sont ou physiques ou
morales. On entend ici par loi physique le cours
réglé de tout événement physique de l'ordre
naturel évidemment le plus avantageux au genre
humain. On entend ici par loi morale la règle de
toute action humaine de l'ordre moral conforme à
l'ordre physique évidemment le plus avantageux au
genre humain. Ces lois forment ensemble ce qu'on
appelle la loi naturelle . Tous les hommes et
toutes les puissances humaines doivent être
soumis à ces lois souveraines, instituées par
l'Être Suprême elles sont immuables et
irréfragables, et les meilleures lois possibles
par conséquent la base du gouvernement le plus
parfait, et la règle fondamentale de toutes les
lois positives car les lois positives ne sont
que des lois de manutention relatives à l'ordre
naturel évidemment le plus avantageux au genre
humain . (Quesnay, Droit Naturel, ch5)
132. Les lois positives et leur nécessaire accord
avec les lois naturelles
- Les lois positives
- Les lois positives sont des règles
authentiques établies par une autorité
souveraine, pour fixer l'ordre de
l'administration du gouvernement, pour assurer la
défense de la société, pour faire observer
régulièrement les lois naturelles, pour réformer
ou maintenir les coutumes et les usages
introduits dans la nation, pour régler les droits
particuliers des sujets relativement à leurs
différents états, pour déterminer l'ordre positif
dans les cas douteux réduits à des probabilités
d'opinion ou de convenance, pour asseoir les
décisions de la justice distributive . (Quesnay,
Droit Naturel, Ch.5)
14b. Les lois positives ou lois humaines doivent
découler des lois naturelles et être conformes à
lordre physique qui est le plus avantageux au
genre humain.
- Mais la première loi positive, la loi
fondamentale de toutes les autres lois positives,
est l'institution de l'instruction publique et
privée des lois de l'ordre naturel, qui est la
règle souveraine de toute législation humaine et
de toute conduite civile, politique, économique
et sociale. Sans cette institution fondamentale,
les gouvernements et la conduite des hommes ne
peuvent être que ténèbres, égarements, confusion
et désordres car sans la connaissance des lois
naturelles, qui doivent servir de base à la
législation humaine et de règles souveraines à la
conduite des hommes, il n'y a nulle évidence de
juste et d'injuste, de droit naturel, d'ordre
physique et moral, nulle évidence de la
distinction essentielle de l'intérêt général et
de l'intérêt particulier, de la réalité des
causes de la prospérité et du dépérissement des
nations nulle évidence de l'essence du bien et
du mal moral, des droits sacrés de ceux qui
commandent et des devoirs de ceux à qui l'ordre
social prescrit l'obéissance
15 La législation positive consiste donc dans la
déclaration des lois naturelles, constitutives de
l'ordre évidemment le plus avantageux possible
aux hommes réunis en société on pourrait dire
tout simplement le plus avantageux possible au
souverain car ce qui est réellement le plus
avantageux au souverain est le plus avantageux
aux sujets. I1 n'y a que la connaissance de ces
lois suprêmes qui puisse assurer constamment la
tranquillité et la prospérité d'un empire et
plus une nation s'appliquera à cette science,
plus l'ordre naturel dominera chez elle, et plus
l'ordre positif y sera régulier on ne
proposerait pas, chez une telle nation, une loi
déraisonnable, car le gouvernement et les
citoyens en apercevraient aussitôt l'absurdité.
(Quesnay, Droit Naturel, ch5)
16c. Propriété et inégalités naturelles piliers de
la Loi Naturelle
- Le fondement de la société est la subsistance
des hommes, et les richesses nécessaires à la
force qui doit les défendre, ainsi il n'y aurait
que l'ignorance qui pût, par exemple, favoriser
l'introduction de lois positives contraires à
l'ordre de la reproduction et de la distribution
régulière et annuelle des richesses du territoire
d'un royaume. Si le flambeau de la raison y
éclaire le gouvernement, toutes les lois
positives nuisibles à la société et au souverain,
disparaîtront. ( Quesnay, Droit Naturel, ch5) -
- Seule LA SURETE DE LA PROPRIETE EST LE
FONDEMENT ESSENTIEL DE LORDRE ECONOMIQUE DE LA
SOCIETE , Quesnay Maximes générales du
gouvernement dun royaume agricole (4ème )
17La légitimation de linégalité parmi les hommes
- Mais en considérant les facultés corporelles
et intellectuelles, et les autres moyens de
chaque homme en particulier, nous y trouverons
encore une grande inégalité relativement à la
jouissance du droit naturel des hommes. Cette
inégalité n'admet ni juste ni injuste dans son
principe elle résulte de la combinaison des lois
de la nature et les hommes ne pouvant pénétrer
les desseins de l'Être Suprême dans la
construction de l'univers, ne peuvent s'élever
jusqu'à la destination des règles immuables qu'il
a instituées pour la formation et la conservation
de son ouvrage. Cependant, si on examine ces
règles avec attention, on apercevra au moins que
les causes physiques du mal physique sont
elles-mêmes les causes des biens physiques , que
la pluie, qui incommode le voyageur, fertilise
les terres et si on calcule sans prévention, on
verra que ces causes produisent infiniment plus
de bien que de mal, et qu'elles ne sont
instituées que pour le bien que le mal qu'elles
causent incidemment, résulte nécessairement de
l'essence même des propriétés par lesquelles
elles opèrent le bien. C'est pourquoi elles ne
sont, dans l'ordre naturel relatif aux hommes,
des lois obligatoires que pour le bien elles
nous imposent le devoir d'éviter, autant que nous
le pouvons, le mal que nous avons à prévoir par
notre prudence. (Quesnay, Droit Naturel, ch3)
18II. Une conception des richesses et ses
conséquences
- La terre unique richesse
- La terre est la mère de tous les biens
(Mirabeau) - Une perception des classes et de la production
nationale de richesses - Quesnay le produit du travail de lartisan ne
vaut que la dépense sil coûtait plus il y
aurait perte. Le produit du travail du
cultivateur surpasse la dépense, plus il la
surpasse, plus il est profitable, et plus il
augmente lopulence de la nation .
19La société et ses classes
- La nation est réduite à trois classes de
citoyens la classe productive, la classe des
propriétaires et la classe stérile. - La classe productive est celle qui fait renaître
par la culture du territoire les richesses
annuelles de la nation, qui fait les avances des
dépenses des travaux de l'agriculture, et qui
paye annuellement les revenus des propriétaires
des terres. On renferme dans la dépendance de
cette classe tous les travaux et toutes les
dépenses qui s'y font jusqu'à la vente des
productions à la première main, c'est par cette
vente qu'on connaît la valeur de la reproduction
annuelle des richesses de la nation.
20- La classe des propriétaires comprend le
souverain, les possesseurs des terres et les
décimateurs. Cette classe subsiste par le revenu
ou produit net de la culture, qui lui est payé
annuellement par la classe productive, après que
celle-ci a prélevé, sur la reproduction qu'elle
fait renaître annuellement, les richesses
nécessaires pour se rembourser de ses avances
annuelles et pour entretenir ses richesses
d'exploitation.
21- La classe stérile est formée de tous les
citoyens occupés à d'autres services et à
d'autres travaux que ceux de l'agriculture, et
dont les dépenses sont payées par la classe
productive et par la classe des propriétaires,
qui eux-mêmes tirent leurs revenus de la classe
productive . - Quesnay François, Analyse de la Formule
Arithmétique du Tableau Economique de la
Distribution des Dépenses Annuelles dune Nation
Agricole, 1766
22- c. Contre les pratiques mercantiles la
nécessaire réforme agraire et la libéralisation
du commerce des grains pour accroître les
richesses
232. Une représentation idéelle du fonctionnement
supposé de léconomie le Tableau Economique et
le Zic-Zac
24b. Le zic-zac
25Conclusion
- Une nouvelle légitimation de lordre social
- Une utopie?
26Chapitre 3
- Les nouveaux débats du 18ème siècle et
laffirmation progressive du libéralisme - Le luxe, lharmonisation des intérêts et le doux
commerce
27I. La justification de la poursuite de lintérêt
individuel
- La querelle du luxe un exemple lopposition
entre Rousseau (1712-1778) et Voltaire
(1694-1778)
28Rousseau, Discours sur les sciences et les arts,
1750
- Socrate avait commencé dans Athènes le vieux
Caton continua dans Rome de se déchaîner contre
ces Grecs artificieux et subtils qui séduisaient
la vertu et amollissaient le courage de ses
concitoyens. Mais les sciences, les arts et la
dialectique prévalurent encore Rome se remplit
de philosophes et d'orateurs on négligea la
discipline militaire, on méprisa l'agriculture,
on embrassa des sectes et l'on oublia la patrie.
Aux noms sacrés de liberté, de désintéressement,
d'obéissance aux lois, succédèrent les noms
d'Epicure, de Zénon, d'Arcésilas. "Depuis que les
savants ont commencé à paraître parmi nous,
disaient leurs propres philosophes, les gens de
bien se sont éclipsés". Jusqu'alors les Romains
s'étaient contentés de pratiquer la vertu tout
fut perdu quand ils commencèrent à l'étudier. - O Fabricius ! qu'eût pensé votre grande âme,
si pour votre malheur rappelé à la vie, vous
eussiez vu la face pompeuse de cette Rome sauvée
par votre bras et que votre nom respectable avait
plus illustrée que toutes ses conquêtes ? "Dieux!
eussiez-vous dit, que sont devenus ces toits de
chaume et ces foyers rustiques qu'habitaient
jadis la modération et la vertu ? Quelle
splendeur funeste a succédé à la simplicité
romaine ? Quel est ce langage étranger ? Quelles
sont ces murs efféminées ? Que signifient ces
statues, ces tableaux, ces édifices ? Insensés,
qu'avez-vous fait ? Vous les maîtres des nations,
vous vous êtes rendus les esclaves des hommes
frivoles que vous avez vaincus ? Ce sont des
rhéteurs qui vous gouvernent ? C'est pour
enrichir des architectes, des peintres, des
statuaires, et des histrions, que vous avez
arrosé de votre sang la Grèce et l'Asie ? Les
dépouilles de Carthage sont la proie d'un joueur
de flûte ? Romains, hâtez-vous de renverser ces
amphithéâtres brisez ces marbres brûlez ces
tableaux chassez ces esclaves qui vous
subjuguent, et dont les funestes arts vous
corrompent. Que d'autres mains s'illustrent par
de vains talents le seul talent digne de Rome
est celui de conquérir le monde et d'y faire
régner la vertu. Quand Cynéas prit notre Sénat
pour une assemblée de rois, il ne fut ébloui ni
par une pompe vaine, ni par une élégance
recherchée. Il n'y entendit point cette éloquence
frivole, l'étude et le charme des hommes futiles.
Que vit donc Cynéas de si majestueux ? O citoyens
! Il vit un spectacle que ne donneront jamais vos
richesses ni tous vos arts le plus beau
spectacle qui ait jamais paru sous le ciel,
l'assemblée de deux cents hommes vertueux, dignes
de commander à Rome et de gouverner la terre".
...
29Voltaire, Le Mondain, 1736
- Regrettera qui veut le bon vieux temps,Et l'âge
d'or, et le règne d'Astrée,Et les beaux jours de
Saturne et de Rhée,Et le jardin de nos premiers
parentsMoi je rends grâce à la nature sageQui,
pour mon bien, m'a fait naître en cet âgeTant
décrié par nos tristes frondeurs Ce temps
profane est tout fait pour mes murs.J'aime le
luxe, et même la mollesse,Tous les plaisirs, les
arts de toute espèce,La propreté, le goût, les
ornements Tout honnête homme a de tels
sentiments.Il est bien doux pour mon cur très
immondeDe voir ici l'abondance à la ronde,Mère
des arts et des heureux travaux,Nous apporter,
de sa source féconde,Et des besoins et des
plaisirs nouveaux.L'or de la terre et les
trésors de l'onde,Leurs habitants et les peuples
de l'air,Tout sert au luxe, aux plaisirs de ce
monde.O le bon temps que ce siècle de fer !Le
superflu, chose très nécessaire,A réuni l'un et
l'autre hémisphère.
Voyez-vous pas ces agiles vaisseauxQui, du
Texel, de Londres, de Bordeaux,S'en vont
chercher, par un heureux échange,De nouveaux
biens, nés aux sources du Gange,Tandis qu'au
loin, vainqueurs des musulmans,Nos vins de
France enivrent les sultans ?Quand la nature
était dans son enfance,Nos bons aïeux vivaient
dans l'ignorance,Ne connaissant ni le tien ni le
mien.Qu'auraient-ils pu connaître ? ils
n'avaient rien.Ils étaient nus et c'est chose
très claireQue qui n'a rien n'a nul partage à
faire.Sobres étaient. Ah! je le crois encor
Martialo n'est point du siècle d'or.D'un bon
vin frais ou la mousse ou la sèveNe gratta point
le triste gosier d'EveLa soie et l'or ne
brillaient point chez eux.Admirez-vous pour cela
nos aïeux?Il leur manquait l'industrie et
l'aisance Est-ce vertu ? c'était pure
ignorance.Quel idiot, s'il avait eu pour
lorsQuelque bon lit, aurait couché dehors ?
30La polémique continue Lettre de Voltaire à
Rousseau, 1755
- J'ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre
le genre humain, et je vous en remercie. Vous
plairez aux hommes, à qui vous dites leurs
vérités, et vous ne les corrigerez pas. On ne
peut peindre avec des couleurs plus fortes les
horreurs de la société humaine, dont notre
ignorance et notre faiblesse se promettent tant
de consolations. On n'a jamais employé tant
d'esprit à vouloir nous rendre bêtes il prend
envie de marcher à quatre pattes, quand on lit
votre ouvrage. Cependant, comme il y a plus de
soixante ans que j'en ai perdu l'habitude, je
sens malheureusement qu'il m'est impossible de la
reprendre, et je laisse cette allure naturelle à
ceux qui en sont plus dignes que vous et moi. Je
ne peux non plus m'embarquer pour aller trouver
les sauvages du Canada premièrement, parce que
les maladies dont je suis accablé me retiennent
auprès du plus grand médecin de l'Europe, et que
je ne trouverais pas les mêmes secours chez les
Missouris, secondement, parce que la guerre est
portée dans ces pays-là, et que les exemples de
nos nations ont rendu les sauvages presque aussi
méchants que nous. Je me borne à être un sauvage
paisible dans la solitude que j'ai choisie auprès
de votre patrie, où vous devriez être. Je
conviens avec vous que les belles-lettres et les
sciences ont causé quelquefois beaucoup de mal.
() De toutes les amertumes répandues sur la vie
humaine, ce sont là les moins funestes. Les
épines attachées à la littérature et à un peu de
réputation ne sont que des fleurs en comparaison
des autres maux qui de tout temps ont inondé la
terre. - M. Chappuis m'apprend que votre santé est bien
mauvaise il faudrait la venir rétablir dans
l'air natal, jouir de la liberté, boire avec moi
du lait de nos vaches, et brouter nos herbes.
Je suis très philosophiquement et avec la plus
grande estime, etc.
31Réponse de Rousseau, septembre 1755
- Le goût des lettres et des arts naît chez un
peuple d'un vice intérieur qu'il augmente et
s'il est vrai que tous les progrès humains sont
pernicieux à l'espèce, ceux de l'esprit et des
connaissances qui augmentent notre orgueil et
multiplient nos égarements, accélèrent bientôt
nos malheurs. Mais il vient un temps où le mal
est tel que les causes mêmes qui l'ont fait
naître sont nécessaires pour l'empêcher
d'augmenter c'est le fer qu'il faut laisser dans
la plaie, de peur que le blessé n'expire en
l'arrachant. Quant à moi si j'avais suivi ma
première vocation et que je n'eusse ni lu ni
écrit, j'en aurais sans doute été plus heureux.
Cependant, si les lettres étaient maintenant
anéanties, je serais privé du seul plaisir qui me
reste. C'est dans leur sein que je me console de
tous mes maux c'est parmi ceux qui les
cultivent que je goûte les douceurs de l'amitié
et que j'apprends à jouir de la vie sans craindre
la mort.... - Je suis sensible à votre invitation et si cet
hiver me laisse en état d'aller au printemps
habiter ma patrie, j'y profiterai de vos bontés.
Mais j'aimerais mieux boire de l'eau de votre
fontaine que du lait de vos vaches, et quant aux
herbes de votre verger, je crains bien de n'y en
trouver d'autres que le Lotos, qui n'est pas la
pâture des bêtes, et le Moly qui empêche les
hommes de le devenir. - Le lotos plante mythologique dans lOdyssée
sorte de drogue qui fait perdre la mémoire - Le moly plante mythologique antidote aux
sortilèges qui fait regagner la raison
322. Bernard Mandeville (1670-1733), La fable des
abeilles, (1714) et la justification des vices et
de la poursuite de lintérêt égoïstes
- La prospérité malgré le vice
- C'est ce qui, comme l'harmonie en musique,
- Faisait dans l'ensemble s'accorder les
dissonances. - Des parties diamétralement opposées
- Se prêtent assistance mutuelle, comme par dépit,
- Et la tempérance et la sobriété
- Servent la gourmandise et l'ivrognerie.
- La source de tous les maux, la cupidité,
- Ce vice méchant, funeste, réprouvé,
- Était asservi à la prodigalité,
- Ce noble péché, tandis que le luxe
- Donnait du travail à un million de pauvres gens,
- Et l'odieux orgueil à un million d'autres.
- Lenvie elle-même, et la vanité,
- Étaient serviteurs de l'application
industrieuse - Leur folie favorite, l'inconstance
- Dans les mets, les meubles et le vêtement,
- Ce vice bizarre et ridicule, devenait
33- Le nouveau souhait
- Grands dieux! Si seulement nous avions de
l'honnêteté! - Mercure souriait de cette impudence.
- Et d'autres trouvaient absurde
- D'invectiver sans cesse contre ce qu'ils aimaient
tant. - Mais Jupiter transporté d'indignation.
- Finit par jurer dans sa colère Qu'il
débarrasserait - Cette ruche braillarde de la malhonnêteté .
- C'est ce qu'il fit. À l'instant même celle-ci
disparaît - Et l'honnêteté emplit leur cur
- Les conséquences
- Mais, ô dieux! Quelle consternation,
- Quel immense et soudain changement!
- En une demi-heure, dans toute la nation,
- Le prix de la viande baissa d'un sou par livre.
- À mesure que l'orgueil et le luxe décroissent,
- Graduellement ils quittent aussi les mers.
- Ce ne sont plus les négociants, mais les
compagnies
34La morale de la fable
- Cessez donc de vous plaindre seuls les fous
veulent - Rendre honnête une grande ruche.
- Jouir des commodités du monde,
- Être illustres à la guerre, mais vivre dans le
confort - Sans de grands vices, c'est une vaine
- Utopie, installée dans la cervelle.
- Il faut qu'existent la malhonnêteté, le luxe et
l'orgueil, - Si nous voulons en retirer le fruit.
- La faim est une affreuse incommodité, assurément,
- Mais y a-t-il sans elle digestion ou bonne santé?
() - Ainsi on constate que le vice est bénéfique,
- Quand il est émondé et restreint par la justice
- Oui, si un peuple veut être grand,
- Le vice est aussi nécessaire à l'État,
- Que la faim l'est pour le faire manger.
- La vertu seule ne peut faire vivre les nations
- Dans la magnificence ceux qui veulent revoir
- Un âge d'or, doivent être aussi disposés
- À se nourrir de glands, qu'à vivre honnêtes.
35II. Lopposition au mercantilisme et le doux
commerce
- François Véron Duverger de Forbonnais (1722-1800)
et la différence entre commerce intérieur
(naturel) et commerce extérieur (non naturel) - 2. Le doux commerce contre le mercantilisme
Jean-François Melon (1675-1738) et
Montesquieu (1689-1755) - Melon Cest là le droit naturel et primitif
des nations, selon lequel le droit dune nation
particulière cède au droit des autres nations
ensemble de même que le droit dune famille ou
dun particulier cède à celui dune nation . - Montesquieu Partout où il y a des murs
douces, il y a du commerce, et partout où il y a
du commerce, il ya des murs douces
36III. Les précurseurs des idées libérales
- 1. Pierre Le Pesant de Boisguillebert ou
Boisguilbert (1646-1714) et Le Détail de la
France (1697) - a. Critique de la fiscalité féodale trop
complexe et très peu rentable pour lEtat - b. La nécessaire réforme fiscale et la libération
du commerce pour accroître les richesses
considérées comme les biens permettant de
satisfaire les besoins humains
37Les prémisses dun circuit et la nécessité de
stimuler lagriculture
Revenus de fonds
Revenus dindustrie
382. Richard Cantillon (1697-1734) Essai sur la
nature du commerce en général en 1755
- a. Origine des richesses et détermination des
prix - La terre est la source ou la matière doù lon
tire la richesse, le travail de lhomme est la
forme qui la produit . - Plus il y a de travail dans un Etat, et plus
lEtat est riche naturellement . - - Le prix comme résultat dune altercation
39- Supposons les bouchers dun côté et les
acheteurs de lautre. Le prix de la viande se
déterminera après quelques altercations et une
livre de buf sera à peu près en valeur à une
pièce dargent, comme tout le buf, quon expose
en vente au marché, est à tout largent quon y
apporte pour acheter du buf. Cette proportion se
règle par laltercation. Le boucher soutient son
prix sur le nombre dacheteurs quil voit les
acheteurs, de leur côté, offrent moins selon
quils croient que le boucher aura moins de
débit le prix réglé par quelques-uns est
ordinairement suivi par les autres. Les uns sont
plus habiles à faire valoir leur marchandise, les
autres plus adroits à la décréditer. Quoique
cette méthode de fixer les prix des choses au
marché nait aucun fondement juste ou
géométrique, puisquelle dépend souvent de
lempressement ou de la facilité dun petit
nombre dacheteurs, ou de vendeurs cependant il
ny a pas dapparence plus convenable. Il est
constant que la quantité des denrées ou des
marchandises mises en vente, proportionnée à la
demande ou à la quantité des acheteurs, est la
base sur laquelle on fixe, ou sur laquelle on
croit toujours fixer, les prix actuels des
marchés et quen général, ces prix ne
sécartent pas beaucoup de la valeur
intrinsèque. , - Cantillon Richard (1755), Essai sur la Nature
du Commerce en général, Editions de lInstitut
National dEtudes Démographiques, 1997, Chapitre
II, Deuxième Partie, p. 66-67.
40b. Le fonctionnement dun circuit économique
- Tous ces genres de travail servent non
seulement le Prince et les Propriétaires, mais se
servent mutuellement les uns aux autres
41- c. Le rôle de lentrepreneur
- d. Des positions mercantiles liberté de commerce
intérieur mais interventionnisme dans le commerce
extérieur - Le commerce qui est le plus essentiel à un
Etat pour laugmentation ou la diminution de ses
forces est le commerce avec létranger, que celui
de lintérieur dun Etat nest pas dune si
grande considération dans la politique quon ne
soutient quà demi le commerce avec létranger
quand on na pas lil à augmenter et maintenir
de gros négociants naturels du pays, des
bâtiments et des matelots, des ouvriers et des
manufactures et surtout quil faut toujours
sattacher à maintenir la balance contre les
étrangers . Troisième Partie Du commerce
extérieur
423. Turgot (1727-1781)
- Une valorisation de lintérêt individuel
- Un homme connaît mieux son intérêt quun autre
homme à qui cet intérêt est entièrement
indifférent Eloge de Vincent de Gournay, Ecrits
Economiques, p.87 - Lintérêt particulier abandonné à lui-même
produira toujours plus sûrement le bien général
que les opérations du gouvernement . p. 91 - b. Une opposition aux survivances féodales et aux
droits féodaux